Règles, menstrues ou être en période, autant de termes pour désigner le cycle menstruel de la femme. Un sujet qui suscite honte, gêne à son évocation tellement il est tabou. Le constat est sans équivoque. Immersion dans l’univers intime des femmes.
C’est tout simplement naturel chez la femme, d’après Soda Diallo, une jeune fille, la vingtaine bien sonnée. Cette dernière affirme utiliser des tampons hygiéniques en période de règles.
A quelques mètres d’elle, Sophie une vendeuse de cacahuètes nous épie du regard.
A notre question : Mme connaissez vous ce que c’est l’hygiène menstruelle ?
– Elle nous répond par un hochement de la tête.
Le sujet est tabou et gêne, en Afrique notamment.
Seulement avec plus de précisions sur le sujet et avec confiance, Sophie se livre sur la question. Elle indique utiliser des morceaux de tissu qu’elle lave à chaque fois que de besoin. Une méthode bien connue car auparavant c’était la seule et meilleure technique connue par les grand- mères. Ce sont des us et coutumes d’après certaines inculquées à leurs petites filles traditionnellement. Une méthode qui est utilisée de nos jours même si elle tend à disparaitre avec l’arrivée des tampons hygiéniques.
Qu’entend t’on par hygiène menstruelle ?
C’est la capacité à prendre en charge son cycle de manière digne et saine.
Une journée mondiale lui est d’ailleurs dédiée le 28 mai. 28 parce que le cycle menstruel pour une femme compte en moyenne 28 jours. Le choix du cinquième mois en corrélation avec les menstrues qui durent en moyenne 5 jours.
Pour les organisations internationales et les Ong, l’hygiène menstruelle dépend de plusieurs facteurs : des produits sûrs, acceptables et fiables mais aussi l’intimité pour changer de protections et des structures sanitaires pour se laver en toute sécurité.
Selon une enquête publiée en 2023, par Plan International, une femme sur 4 dans le monde en période de menstrues n’a pas accès aux produits et équipements nécessaires.
Cette jeune fille sous le couvert de l’anonymat avoue ne pas disposer chaque mois d’une somme d’argent pour s’acheter un paquet de serviettes hygiéniques.
« J’alterne entre Softcare (Nom de serviette hygiénique) ou un pan de tissu que je garde car il arrive que je ne puisse me procurer cela à chaque fin du mois »
1 femme sur 3 est confronté à la précarité menstruelle : elles manquent de protections périodiques.
Pour cause, des inégalités de genres comme des normes sociales, discriminantes ou encore des tabous culturels d’après l’Ong Care en France qui stipule que « le tabou des règles est la discrimination sexiste la plus répandue dans le monde« . Elle existe aussi bien en France, en Somalie ou au Vanuatu.
Des Ong qui œuvrent pour l’accès des femmes en information et services de santé sexuelle et reproductive, il en existe.
En Côte d’Ivoire, Khady Cissé, sage-femme dans un district sanitaire de Dabou est activiste dans les questions de précarité menstruelle.
Elle est présidente de l’Organisation pour la santé de l’enfant, de la femme et de la famille (OSEFF) et à l’origine du concept de « Menstrues libres », un programme d’accompagnement pour la connaissance du cycle menstruel.
Dans son blog, elle propose des solutions et guide des femmes sur le cycle féminin à travers des explications et solutions adaptées à leurs besoins : « Saignons sans gêne ! #BrisonsLesTabous,#Bienvivretoncycle autant de Hastags qui renseignent sur l’importance de bien vivre pour la femme la période des menstrues.
Au Sénégal, c’est des Ong comme Marie Stopes International installé depuis 2011, qui s’engage à offrir un large choix de services de santé sexuelle et reproductive.
Elle donne des conseils sur l’hygiène menstruelle notamment comment la femme doit vivre le moment de sa période :comment gérer son stress, comment s’alimenter, que faire quand on ressent des douleurs.
Le tabou autour des règles est une question bien existentielle.
En effet, 1 femme sur 10 manque l’école lorsqu’elle est en période; ce qui représente 20% du temps scolaire perdu sur une année.
Ailleurs dans le monde, certaines font recours à des matériaux aux conséquences graves sur le plan sanitaire faute d’ accès aux protections périodiques. Elles utilisent comme moyen de substitution de vieux journaux, des chiffons ou de la boue séchée. Ce qui naturellement peut conduire à des infections ou de l’inconfort.
Priscilla ne se voit pas utiliser autre chose qu’une serviette hygiénique. Elle affirme ne pas badiner sur sa santé.
Et les hommes dans tout cela ? Rencontré dans un quartier au centre ville de Dakar, Malick avoue ne rien connaitre à ce sujet typiquement féminin.
Médusé, à la question de savoir s’il a une épouse, il nous répond par l’affirmatif, avec le sourire. « Je suis nouvellement marié peut être que le sujet va dorénavant m’intéresser dit-il en s’éloignant ».
Par ailleurs, des avancées ont cependant été notées ces dix dernières années.
Des campagnes de sensibilisation ont été menées dans de nombreux pays pour tenter d’enlever le tabou associé parfois à cette question.