Le parti au pouvoir au Sénégal se dirige vers une très large majorité absolue au Parlement au lendemain de législatives censées donner au président et au Premier ministre les moyens de mener d’amples réformes, selon des projections des médias publiées lundi à partir de résultats provisoires.
La radio RFM crédite le Pastef de 119 sièges sur 165 à l’Assemblée nationale. Le site d’information Dakaractu lui attribue jusqu’à 131 députés. Le quotidien gouvernemental Le Soleil titre sur « la déferlante Pastef ».
Les organes électoraux ont jusqu’à mardi soir (19.11.24) pour publier les résultats officiels provisoires au niveau des départements. Mais ces projections annoncent la victoire « écrasante » que réclamait le Premier ministre Ousmane Sonko, président du Pastef, pour appliquer l’agenda de rupture et de transformation de l’Etat qui a porté son second Bassirou Diomaye Faye à la tête du pays à la présidentielle de mars dernier.
Deux principales têtes de liste de l’opposition
Le maire de Dakar Barthélémy Dias et le deuxième de la présidentielle de 2024 Amadou Ba, ainsi que d’autres adversaires du Pastef ont félicité ce dernier. Le Pastef a battu MM. Dias et Ba dans leur bureau de vote, selon les résultats partiels. Le chef du gouvernement Ousmane Sonko l’emporte largement dans son bureau à Ziguinchor (sud), indiquent ces résultats.
Aucun incident significatif n’a été rapporté. La coalition Takku Wallu Sénégal de l’ancien président Macky Sall a cependant dénoncé dans un communiqué une « fraude massive organisée par le Pastef ».
Différents acteurs ont fait état d’une participation moindre que celle de la présidentielle de mars(61,3%). Aux législatives de 2022, 46,6% des inscrits avaient voté.
Mademba Ndiaye, un étudiant de vingt ans, a voté pour la première fois, dans la capitale: « ça fait partie des seuls moyens qu’on a pour réellement impacter la société et je me dis que si on ne vote pas, on ne pourra pas, après, venir se morfondre de ce qui se passe dans la société ».
Pascal Goudiaby, 56 ans, espérait que « le Pastef (gagne) les élections pour avoir la majorité (…) pour mieux dérouler leur mandat. La priorité, c’est le chômage, les jeunes sont tellement confrontés au chômage ».
Bassirou Diomaye Faye a été élu président au premier tour en mars, dénué de toute expérience exécutive mais tiré vers le sommet par l’enthousiasme et l’aspiration au changement d’une population jeune et éprouvée par trois années de confrontation politique et de crise économique.
Son bouillant mentor Ousmane Sonko, qui aurait dû être à sa place si sa candidature n’avait été invalidée, est devenu Premier ministre.
Pendant des mois, ces avocats d’un « panafricanisme de gauche » ont mené une cohabitation conflictuelle avec une Assemblée toujours dominée par l’ancienne majorité présidentielle. M. Faye l’a dissoute dès que les délais constitutionnels l’ont permis, en septembre.
Environ 7,3 millions d’électeurs étaient donc appelés dimanche à élire 165 députés qui siégeront pour cinq ans.
Les électeurs devaient décider de donner ou non au duo Faye-Sonko les moyens de tenir ses promesses: améliorer la vie d’une population dont une grande partie se bat au quotidien pour joindre les deux bouts, partager avec elle les revenus des ressources naturelles comme les hydrocarbures et de la pêche qui auraient été bradés à l’étranger, combattre la corruption, transformer l’Etat et sa justice…
« Je pense que celui à qui tu as donné la confiance à la présidentielle, il faut lui renouveler la confiance pour qu’il puisse accomplir ce qu’il a entamé. On veut que la vie coûte moins cher aux Sénégalais. Tout coûte cher, l’eau, l’électricité, la nourriture », a indiqué Touré Aby, 56 ans.
Le coût de la vie reste une préoccupation majeure, comme le chômage, à plus de 20%. Les nouveaux gouvernants sont à leur tour confrontés à la vague de ces centaines de compatriotes qui partent chaque mois en pirogue chercher un avenir meilleur en Europe.
Historiquement, les Sénégalais mettent en cohérence leur choix de la présidentielle et des législatives et le parti des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) de M. Sonko était donné favori par les experts.
En face, l’opposition était dispersée. Elle a fait campagne en reprenant à son compte le grief formulé par un certain nombre de Sénégalais selon lequel, pendant huit mois, M. Sonko a beaucoup parlé et peu agi. L’intéressé s’en défend en arguant de l’état dans lequel lui et M. Faye ont trouvé le pays et des multiples résistances à l’entreprise de changement des pratiques et du système.
Afp