Au Bénin, la Constitution du 11 décembre 1990 a consacré le multipartisme intégral au rang des principes cardinaux de la démocratie. Cela a donné lieu à une floraison de partis politiques sur l’échiquier politique entre 1990 et 2016.
Au fil des ans, il fallait restructurer les choses au niveau du paysage politique béninois. La réforme du système partisan souhaitée par l’ensemble de la classe politique est intervenue et des textes votés et promulgués.
Les dispositions actuelles visent le regroupement des partis politiques en vue d’élever la qualité de la représentativité au sein des organes élus. Il en est de même pour la qualité de la représentation. Ces différentes dispositions sont attelées avec la charte des partis politiques qui incite au regroupement des forces politiques, à leur modernisation aussi bien dans la gestion que dans leurs stratégies et le code électoral. En effet, le système partisan est pensé et mis en œuvre après plus de deux décennies de démocratie pour lui donner un nouveau souffle. Au-delà des avantages contenus dans lesdits textes, le débat relatif au certificat de conformité est né. Et pour élucider la question, le député, président de la Commission des lois au Parlement, Orden ALLADATIN, a animé une conférence de presse mi-Avril 2025 à Cotonou. A l’occasion, le parlementaire a expliqué les fondements de la réforme et levé les zones d’ombre notamment sur le document en question.
Le certificat de conformité agité dans l’opinion était-il une méthode d’exclusion pour les dernières élections au Bénin ? L’économiste et politologue Antoine ADOUKONOU a été interrogé sur la préoccupation ce samedi 19 avril 2025 au travers du programme hebdomadaire ‘’Sans Détour’’ de la chaine privée béninoise Radio Sêdohoun. En abordant la thématique du programme qu’est ’’Approches et expériences futures du système partisan : Le Bénin dans la dynamique d’une démocratie plus efficace ?’’, l’économiste et politologue, dans une pédagogie particulière a dissipé toutes les polémiques. Selon lui, la loi donnait à l’époque, aux formations existantes six mois pour se conformer aux nouvelles exigences. Toutefois, un décalage entre l’adoption de la loi par l’Assemblée nationale et sa promulgation par le chef de l’État a perturbé ce délai. Résultat, à l’approche de l’enregistrement des candidatures, certains partis risquaient de ne plus avoir d’existence légale. Et, c’est dans ce contexte que la Cour constitutionnelle, pour éviter l’impasse au Bénin, est intervenue pour exiger que les candidats s’assurent que leurs partis étaient bel et bien conformes à la loi.
« Le certificat de conformité n’est plus d’actualité. Mais, il est important de finir avec la polémique. Ceux disent que le certificat de conformité est une pièce inventée, il y a ceux qui sont de bonne foi, d’autres sont des politiciens… Ceux qui le disent de bonne foi, je me dis que certainement, en prenant les textes, la charte des partis politique comme le code électoral, ils n’arrivent pas à voir le groupe de mots ‘’certificat de conformité’’. C’est pourquoi, ils disent que la pièce est inventée. Ce mot est apparu dans la décision de la cour constitutionnelle. Mais, à y voir de près, il y a quand même dans la charte des partis politiques, précisément à l’article 56 de la charte, qui dans les dispositions transitoires, dispose qu’on donne six mois aux partis politiques anciens de se conformer aux nouvelles dispositions c’est-à-dire, quand on a voté la nouvelle charte des partis politiques, nous avons changé de régime juridique en termes de création de partis politiques. Par le passé, nous étions sur la loi de 2001, où il fallait avoir dix membres fondateurs par département pour créer un parti politique. Maintenant, on migre de ce régime juridique pour se retrouver dans le nouveau régime juridique de quinze membres fondateurs par commune et ce, avec douze départements maintenant. Avant, c’était six départements. Une loi sort, ça abroge les dispositions antérieures. Ça veut dire que les partis politiques qui étaient sous l’ancien régime juridique doivent tout faire pour s’arrimer au nouveau régime juridique. D’abord, il y a une seule option proposée par la mouvance c’est-à-dire que tous les anciens partis politiques disparaissent et se recréent par rapport aux nouvelles dispositions. C’est dans les débats que la minorité parlementaire constituée de l’opposition d’alors, a proposé qu’il faut permettre que les anciens partis politiques qui ne veulent pas disparaitre, restent tels mais se conforment au nouveau dispositif. Cette doléance, malgré qu’ils sont minoritaires, est passée. C’est pourquoi dans les dispositions transitoires, l’article 56 dispose qu’on donne six mois aux anciens partis pour se conformer au nouveau régime juridique… »
Poursuivant son développement, Antoine ADOUKONOU précise que « la loi a été promulguée le 17 septembre 2018. Si vous comptez les six mois, ça tombe à 17 mars 2019. Le problème qui s’est posé, c’est ceci : Dans le calendrier électoral, puisqu’il fallait déclarer les candidatures 90 jours avant les scrutins, la CENA tenant compte de ça, s’est vu démarrer les déclarations de candidature un peu avant l’expiration du délai de six mois. Le problème qu’il y a, c’est qu’au moment précis de déclarer les candidatures, les six mois n’étant pas expirés, tout le monde est encore parti politique. Mais, si tout le monde dépose de dossier le jour-là alors que les élections sont prévues pour avril et que ceux qui ne sont pas conformes au nouveau régime juridique déposent avec l’ancien régime et qu’à l’arrivée avant les élections, ils n’arrivent pas à se conformer, qu’est-ce-qu’on fait dans ce sens ? Parce qu’on ne pas aller aux élections avec deux groupes de partis politiques. C’est pour éviter ça que la cour constitutionnelle a dit si tel est le cas, avant de déposer les dossiers, tout le monde doit être conforme au nouveau régime juridique. Et, pour savoir celui qui est conforme au nouveau régime, c’est le ministère de l’intérieur qui peut témoigner puisque c’est lui qui gère les partis politiques. Donc, la cour a dit que le ministère de l’intérieur doit délivrer un papier pour montrer que ce parti-là est conforme au nouveau régime juridique. Ce papier, c’est ça qu’on a appelé le certificat de conformité. Voilà, l’historique du certificat de conformité. »
Cela dit, Antoine ADOUKONOU fait savoir que les textes ne doivent plus faire des vagues. Il parle d’une politique d’inclusion, de non-discrimination et un devoir de respect de la diversité culturelle, sans préjudice pour les dynamiques positives de brassage d’une nouvelle citoyenneté. La loi étant unique pour tous, le code électoral issu de la réforme du système partisan profite à tous les partis politiques. « Je pense que le président TALON a tracé de grands sillons pour l’avenir du pays. Il faudrait quelqu’un qui ait la plénitude et qui comprenne ce qu’on est en train de faire pour pouvoir poursuivre sur ce chemin » pour ne pas retomber dans des formats caducs.
« Aujourd’hui, vous ne pouvez pas être président de la République sans passer par les partis politiques selon les textes. Vous devez être parrainé par les partis politiques. Vous ne pouvez pas être député aujourd’hui sans rester sur une liste de parti politique. Vous ne pouvez pas être conseiller communal, maire aujourd’hui sans rester sur la liste d’un parti politique. », a-t-il poursuivi.
Plusieurs sujets d’intérêt ont été également évoqués dont le ‘’hautement social’’ et la lutte contre la corruption. Antoine ADOUKONOU a soutenu le sociologue de développement, politologue, expert en communication politique institutionnelle et en matière de population et spécialiste en prospective et développement, Professeur Gilles Expédit GOHY dans la logique de la continuité de la dynamique actuelle. Celui-ci estime qu’il sera catastrophique pour le peuple béninois de faire ‘’le retour vers le sinistre’’ aux prochaines échéances électorales. Car, croit-il fermement, seule la continuité pourra permettre à ce pays de l’Afrique de l’Ouest de se révéler davantage au monde.
Sidoine AHONONGA