Analyse sur une possible adhésion du Togo à l’Alliance des États du Sahel

Analyse sur une possible adhésion du Togo à l'Alliance des États du Sahel

L’intégration du Togo dans l’AES ne serait pas impossible selon le ministre togolais des Affaires étrangères, de la Coopération et de l’Intégration africaine.

Dans un entretien accordé par la chaine de télévision VoxAfrica jeudi 16 janvier, Robert Dussey a précisé qu’une telle décision devra toutefois  émaner du président de la République et du Parlement togolais.

Pour l’analyste Louis Magloire Keumayou, très peu d’éléments permettent d’affirmer aujourd’hui que cette situation va se produire et il évoque deux raisons principales.

D’une part, ce serait un aveu d’échec pour Lomé, choisi comme missionnaire avec le Sénégal afin que les trois reconsidèrent leurs positions. En plus, cette intégration dans l’AES démontrerait une fragilisation et une invisibilisation de l’organisation sous-régionale sur la scène de l’Afrique de l’Ouest qui la conduirait vers une dissolution.

D’autre part, le Togo est loin des circonstances qui ont poussé à la création des pays de l’AES, une organisation très militaire qui n’accepte pas l’intervention d’une organisation sur le plan militaire. L’analyste décrit la position très neutre en Afrique de l’Ouest du Togo qui lui profite sur le plan économique et qui lui est d’ailleurs grandement favorable puisqu’elle a largement la préférence des pays de l’AES grâce à la concurrence de ses ports.

L’entrée du Togo dans l’AES n’est pas officielle et ce serait aller trop vite en besogne pour Mouth Bane, journaliste et spécialiste du Sahel selon qui Robert Dussey reconnaît la primauté de la volonté présidentielle sur des questions de souveraineté et de diplomatie lorsqu’il déclare « qu’une telle décision sera prise par le président ou le parlement togolais ».

Mieux, il ne voit aucun inconvénient si telle est la volonté du président de la République du Togo, précisant que le pays est exposé à la menace terroriste. Celui-ci estime que l’insécurité dans le Sahel n’épargne pas le Togo, qui est frontalier au Bénin et au Burkina Faso, tous les deux sous de constantes attaques djihadistes. « Lomé a donc intérêt à s’ouvrir à d’autres alliés pour freiner l’évolution de cette menace contre les côtes ouest-africaines», ajoute M. Bane.

Quel avantage dans un rapprochement Togo-AES ?

Sa prise de position précoce dans les relations avec les pays de l’AES, notamment privilégiant des négociations et non l’isolement de ces derniers, constitue un avantage comparatif pour le Togo selon Louis Magloire Keumayou.

Pour sa part, M. Bane est d’avis que ce rapprochement est bien apprécié du côté des dirigeants de l’AES, d’autant plus que Lomé cherche à gagner la confiance de ces pays qui pourraient se retourner vers lui dans le cadre de leurs importations de produits stratégiques. Toutefois, le Togo ne voudrait pas que les juntes le considèrent comme un pion de LA CEDEAO, affirme le journaliste, spécialiste du Sahel, car cela aurait des conséquences économiques, surtout dans le secteur portuaire entre le Togo et le Burkina Faso. En revanche, du côté des dirigeants togolais, l’on tente de faire croire à une certaine opinion publique que le Togo est favorable à l’adhésion à l’AES, estime-t-il.

Pour lui, ces pays regroupés en confédération considèrent déjà le Togo comme futur allié et lui prêteront oreille attentive dans le rétablissement de la situation dans ce dossier, sans oublier qu’il a joué sa partition dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

En effet, l’armée togolaise a eu à participer à des opérations militaires avec les pays de l’AES, tout comme le Tchad. Par ailleurs, si ces propos du ministre des Affaires étrangères suscitent la joie chez les inconditionnels de l’AES qui jubilent sur les réseaux sociaux, l’analyste Louis Magloire invite l’opinion publique à rester raisonnable.

Les enjeux sont importants selon le journaliste qui liste tout un ensemble de règles qui sera redéfini au terme de l’année de négociation accordée par la CEDEAO. À savoir les places de fonctionnaires réservées aux trois pays sortants qui vont être redistribuées aux pays restés au sein de l’organisation, les avantages de ces pays tirés de la sortie des pays de l’AES, leurs repositionnements, la libre circulation des citoyens au sein de la Cedeao redéfinie ou encore la possibilité pour les entrepreneurs de bénéficier des avantages liés à la communauté de crédits.

Il faudra attendre les conclusions de la médiation des présidents sénégalais et togolais quant à la position définitive des trois pays qui ne laissent entrevoir aucune possibilité sur leur retour au sein de la CEDEAO, conclut-il.

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