Selon l’ONG Human Rights Watch, le gouvernement burkinabè devrait, de toute urgence, protéger les civils affectés par le conflit armé, préserver l’espace civique pour les activistes, les journalistes et l’opposition politique, et veiller à ce que les auteurs de graves abus soient tenus responsables de leurs actes.
La procédure d’examen des rapports des États membres de l’Union Africaine exige que les pays soumettent des rapports réguliers détaillant les mesures, y compris législatives, prises pour faire respecter les droits consacrés par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
« L’examen du Burkina Faso par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) est une occasion unique de dialoguer avec les autorités burkinabè sur leurs pratiques en matière de droits humains », a déclaré Allan Ngari, directeur du plaidoyer pour l’Afrique à Human Rights Watch. « La CADHP devrait inciter les autorités burkinabè à donner la priorité à la protection des civils lors des opérations militaires et à garantir le respect du droit international humanitaire. »
Le rapport du Burkina Faso décrit les mesures prises pour lutter contre « l’extrémisme violent » et le terrorisme, notamment la création d’un pôle chargé de l’enquête et de la poursuite des infractions liées au terrorisme, ainsi que la mobilisation de prévôts responsables de la discipline des militaires et de la protection des droits des détenus. Il indique également que les forces de sécurité reçoivent une formation en matière de droits humains et de droit international humanitaire afin de prévenir les abus, et que les responsables d’« actes inhumains ou dégradants » sont tenus de rendre des comptes.
Cependant, Human Rights Watch souligne avoir documenté de graves abus commis par les forces de sécurité burkinabè lors d’opérations de contre-insurrection, y compris des crimes contre l’humanité. Les soldats auraient illégalement tué et fait disparaître de force des centaines de civils qu’ils accusaient de collaborer avec des groupes armés islamistes.
« Les groupes armés islamistes ont également commis de graves abus contre les civils, notamment des exécutions sommaires, des violences sexuelles, des enlèvements et des pillages, et continuent d’assiéger de nombreuses villes et villages dans le pays », précise l’ONG.
En décembre 2023, la CADHP avait exprimé sa préoccupation face à l’enlèvement du défenseur des droits humains Daouda Diallo, ainsi que face aux « actes d’intimidation, de harcèlement judiciaire et de représailles » contre tous les défenseurs des droits humains. En juillet, elle a dénoncé la disparition forcée présumée de trois journalistes burkinabè et a appelé les autorités à fournir des informations sur leur sort et à les libérer. Malgré les demandes des familles et des avocats, les autorités n’ont fourni aucune information sur le lieu où se trouvent les journalistes.
L’ONG a déploré que la CADHP ne se soit pas rendue au Burkina Faso depuis plusieurs années. Elle a suggéré que la Commission demande l’autorisation d’effectuer une visite officielle pour évaluer la situation des droits humains et publier un rapport exhaustif.
« La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples devrait mener une discussion approfondie sur les graves abus commis par les forces de sécurité burkinabè et par les groupes armés islamistes, ainsi que sur la nécessité d’assurer la reddition des comptes », a conclu Allan Ngari. « La CADHP devrait également recommander des mesures concrètes pour garantir la protection des activistes, des journalistes et des opposants politiques au Burkina Faso, afin qu’ils puissent mener leur travail sans crainte. »
Ndèye Mour