Le Tchad est au cœur d’intenses interrogations, ces derniers temps, au sujet de sa nouvelle « position stratégique », sur le plan international.
S’ajoutant aux tumultes de la situation politique interne de ce pays, les intentions prêtées à ses autorités laissent perplexes. Un des responsables de la coalition qui a soutenu et fait élire l’actuel chef de l’État tchadien, en séjour en Europe, en plus des activités de son parti, l’Union nationale pour le développement et le renouveau, se prononce sur ce qu’il qualifie de “rumeurs“ des réseaux sociaux. Une grande interview avec Célestin Topona Mocnga, 1er vice-président chargé des relations extérieures et de la communication de l’UNDR, le parti dirigé par l’ancien Premier ministre de Transition, Saleh Kebzabo (l’actuel médiateur de la République).
Lesnouvellesdafrique.info: Après trois ans de Transition, Mahamat Idriss Déby Itno a été élu président de la République du Tchad. Quel bilan faites-vous de la Transition pour laquelle votre parti a été partie prenante ? Pensez-vous que votre parti a été récompensé à la hauteur de ses espérances ?
Célestin Topona Mocnga : Lorsque la même question m’avait été posée par vous en mars dernier, je vous ai répondu que beaucoup de chemin avait été parcouru par le Tchad pendant la première période de la Transition et une bonne partie de la dernière[sc1] . Il y a eu le Dialogue national inclusif et souverain (DNIS), la formation d’un gouvernement de Transition comprenant plusieurs composantes politiques et politico-militaires, un Conseil national de Transition (CNT sur le même label), les autres grandes institutions créées… Bref, un début de normalisation effective de la vie politique multipartite… Il ne restait plus que le référendum constitutionnel et l’élection présidentielle, qui ont été organisés en décembre 2023 et mai 2024. La boucle est désormais bouclée et les acteurs politiques de tous bords ont désormais un champ balisé pour rivaliser d’imagination afin de séduire les Tchadiens à leur cause dans un environnement des plus démocratique, peut-être mieux [sc2] qu’avant le début de l’ère transitoire. L’UNDR, mon parti, a évidemment pris une part importante dans ce processus de normalisation de la situation sociopolitique, puisqu’étant partie prenante des institutions que je viens de citer.
Vous avez soutenu la Transition à la suite du décès du président Idriss Déby Itno. Avec le retour à l’ordre constitutionnel, quelle est la position actuelle de votre formation politique ? Faites-vous partie de la majorité présidentielle ou de l’opposition ?
Célestin Topona Mocnga : La majorité qui dirige le pays peut en effet être déclinée par la présence d’une multitude de courants politiques représentés au sein du Gouvernement après la présidentielle. Mais comme il n’y a pas encore eu d’élections législatives, le Conseil national de Transition fait office d’Assemblée nationale provisoire où effectivement se trouvent aussi des représentants des mêmes organisations sociopolitiques qui légifèrent dans un cadre qui n’est pas dit majorité-opposition classique en démocratie. Il s’agit plutôt d’un consensus et tout sera clarifié lors des premières consultations législatives en décembre et l’ordre constitutionnel pourra être définitivement consolidé.
Je peux donc affirmer que l’UNDR fait partie des animateurs de la Transition. Ce que vous appelez opposition est constituée selon moi, par les partis politiques qui n’ont pas accepté l’idée même d’une transition, le principe même de la rupture de l’ordre constitutionnel en avril 2021. À ces organisations s’ajoutent certains courants de la société civile. La scène politique et sociale est en tout cas riche, le débat démocratique a lieu et les voix discordantes à la Transition se font entendre en toute liberté, avec véhémence ou non. La position de l’UNDR est de soutenir la démocratie, d’exorciser les violences, surtout de bannir à tout jamais les rébellions armées comme mode d’expression pour faire valoir ses opinions politiques, le tout dans le but de sauver l’unité nationale et favoriser le développement économique du pays. Nous ne voulons plus du pouvoir par les armes.
Vous évoquiez à l’instant l’organisation, à la fin de l’année en cours, d’élections législatives, locales et sénatoriales, prévues d’ici la fin de l’année 2024. Comment l’UNDR prépare-t-elle ces échéances électorales ? Allez-vous nouer une alliance avec le Mouvement patriotique du salut (MPS) au pouvoir ou avec d’autres formations politiques ?
Célestin Topona Mocnga : Comme je l’annonçais déjà à votre deuxième question, un autre challenge, et pas des moindres, attend toute la classe politique d’ici la fin de l’année. Un parti politique est créé, par essence, pour conquérir le pouvoir. Le premier palier que peut et doit franchir un parti, c’est d’être présent à toutes les élections et de gagner absolument quelque chose à leur issue. Le chronogramme des consultations électorales à venir est publié. L’UNDR va s’y engouffrer et prépare activement les élections législatives annoncées. Nous serons aussi présents à toutes les autres consultations.
Nous avons été actifs dans la Coalition pour un Tchad uni, qui a remporté la présidentielle du 7 mai 2024 avec 61,03 % des voix, faisant de son candidat Mahamat Idriss Deby Itno le premier président de la République du Tchad de la 5e République démocratiquement élu. C’est un travail titanesque que la coalition a abattu ; l’UNDR était aux premières loges et j’étais moi-même le 1er adjoint du directeur national de campagne du candidat de la coalition. Et c’est donc ensemble, avec le Mouvement patriotique du Salut (anciennement au pouvoir, NDLR) et les 200 autres partis politiques et associations de la société civile, que nous avons battu une vigoureuse et pacifique campagne d’explications auprès des Tchadiens qui nous ont finalement compris et qui ont voté pour nous.
En principe, c’est la même dynamique politique qui devrait prévaloir. Je dis « en principe », parce qu’aucun autre argumentaire n’est venu jusqu’ici démontrer le contraire de la part de nos états-majors de la Coalition pour un Tchad uni. Pour l’UNDR, en tout cas, il est souhaitable que des alliances plus structurées que pendant les élections législatives soient nouées, pour donner au président élu une majorité confortable à la prochaine Assemblée nationale et lui permettre d’exécuter harmonieusement le programme en dix principaux points qu’il a proposé au peuple tchadien.
Nous n’avons pas rompu le contact avec le MPS et, dans les prochains jours, nous pourrons vous en dire plus, s’il est prévu ou non une alliance électorale avec le parti ou avec une coalition encore plus large de partis. Quant aux instances de notre parti, elles sont déjà imprégnées de l’éventuelle nouvelle situation électorale, ces instances qui, depuis plus de trente ans, sont habituées à aller presque seules se battre sur le terrain électoral.
Le contexte n’est plus le même qu’il y a trente ans, bien entendu, et, si tant est qu’il existe un esprit d’union des forces politiques pour gagner loyalement une élection, comme je l’ai dit concernant l’élection présidentielle, eh bien l’UNDR est preneuse de toute initiative politique allant dans ce sens.
Concernant la deuxième partie de votre question, mon parti a pris acte de sa présence dans les différentes institutions du pays, sans pour autant vous mentir, en n’occultant pas les pressions dont la hiérarchie fait l’objet de la part des structures de base, qui espéraient plus en termes de postes à responsabilités de ses militants. Mais, je pense qu’il faut que nos militants se surpassent et, se préparent, pour prendre d’assaut les places électives qui sont nombreuses, que ce soit aux législatives, aux sénatoriales ou aux communales. Le parti ne peut agir contre ses propres intérêts en ne pensant pas à ceux qui y militent.
Selon nos informations, la plupart des partis politiques qui ont soutenu la candidature du président Mahamat Idriss Déby Itno dans le cadre de la Coalition pour un Tchad uni sont mécontents. Ils estiment s’être fait gruger par le MPS. Avez-vous le même sentiment ?
Célestin Topona Mocnga : Je n’emploierai pas le mot “gruger“ pour l’UNDR. Je respecte la souveraineté des autres partis politiques de la Coalition pour un Tchad uni dans leur appréciation de l’après présidentielle, mais j’estime qu’il faut raison garder et ne se focaliser que sur les postes à responsabilités que chaque parti peut revendiquer légitimement.
L’UNDR pense qu’il faut poursuivre la lutte jusqu’à avoir une représentativité appréciable dans les institutions qui restent à pourvoir, comme je l’ai indiqué plus haut. Il faut que la nouvelle configuration que nous voulons soit une réalité après les dernières élections. À ce moment-là, il faut créer, dans le pays, les conditions favorables à l’éclosion d’un environnement socio-économique qui permettraient au Tchad de trouver des opportunités d’emploi pour les jeunes. Le gros problème du pays aujourd’hui est cette bombe à retardement que constitue le chômage qui frappe des milliers de diplômés sans emploi qui manquent de perspectives d’avenir. C’est le politique qui crée les conditions nécessaires au développement d’un pays, et non le contraire.
Le développement de tout pays passe par les bras valides que sont les jeunes filles et jeunes garçons, et de surcroît diplômés dans plusieurs domaines, qui, au Tchad, n’arrivent pas être absorbés par l’État ni par le secteur privé.
Il faut relever cette anomalie et, pour les membres de la Coalition pour un Tchad uni, il est question de faire en sorte que les propositions de leur candidat pour sortir le pays du sous-développement soient traduites en actes concrets. D’où la nécessité d’avoir dans la future Assemblée nationale une certaine aisance pour que le gouvernement applique effectivement le programme tel qu’il est conçu, afin de permettre aux dirigeants de régler un tant soit peu la question du chômage endémique qui frappe la jeunesse tchadienne. Il faut aussi mettre l’accent sur la justice et la lutte contre la corruption, car, même pour les rares possibilités qui s’offrent sur le marché national de l’emploi, il faut laisser une chance à tous les jeunes, sans distinction aucune. Ce qui n’est pas forcément le constat que nous faisons aujourd’hui, où la corruption n’a pas encore disparu, malgré la volonté affichée par le gouvernement de l’éradiquer.
Des rumeurs font état d’une crise au sein de l’UNDR, suite à la démission de son 2e vice-président, l’actuel ministre de l’Élevage et de la Production animale, Abderrahim Awat Atteib alias Alboury. Qu’en est-il exactement ?
Célestin Topona Mocnga : Les démissions, les trahisons, les ingratitudes, les hypocrisies, les infiltrations, les jalousies et autres opportunistes font partie intégrante de toute organisation, qu’elle soit politique ou pas. Ceux qui scrutent l’histoire de l’UNDR au Tchad savent qu’aujourd’hui, tenez-vous bien, il n’y a pas moins de six (6) partis politiques qui sont dirigés sur la place, à N’Djaména, par des transfuges du parti, sans oublier des cadres qui nous ont quittés pour tenter de se positionner socialement ailleurs et qui ont tous été laissés sur le carreau. L’UNDR a-t-elle fermé boutique ? Non. La dernière décision que vous citez a donné l’occasion aux cellules de base de l’importante région du Ouaddaï, dont Abéché est le chef-lieu (dans l’est du Tchad) et d’où est originaire le démissionnaire, de se remobiliser pour réaffirmer leur loyauté à leur parti. Une grande manifestation a d’ailleurs eu lieu à cette occasion le 8 septembre dernier. Le parti se prépare là-bas pour les prochaines échéances électorales. Vous voyez bien la résilience de l’UNDR qui sait gérer les problèmes que des commanditaires malveillants, tapis dans l’ombre, veulent lui créer en utilisant certains de ses militants faibles de conviction qui, comme dans le cas que vous évoquez, doivent pourtant beaucoup à l’UNDR dans leur ascension politique et sociale. Mais l’exécutif poursuit imperturbablement son leadership du parti comme si de rien n’était et continue d’enregistrer de nouvelles adhésions toujours plus importantes.
La Coalition pour un Tchad uni a-t-elle un avenir ?
Célestin Topona Mocnga : Si les acteurs de la coalition le veulent, elle aura un avenir.
Le Tchad comme beaucoup de pays du Sahel fait face à des pluies diluviennes qui ont causé beaucoup de dégâts, matériels et en vies humaines. Quelles sont les mesures à prendre pour prévenir ces inondations récurrentes en ce qui concerne votre pays ?
Célestin Topona Mocnga : D’abord, je note, pour m’en satisfaire, que les autorités tchadiennes ont immédiatement créé une structure formelle pour faire face à ces inondations. Il s’agit du Comité national de prévention et de gestion des inondations. Les pays du Sahel sont en effet durement frappés par les pluies diluviennes qui ont causé d’affreux dégâts, tant humains que matériels. Des centaines de victimes humaines sont enregistrées, du bétail emporté. C’est l’apocalypse, on pourrait dire.
Le Tchad est endommagé dans presque tous ses points cardinaux par un phénomène qu’aucun citoyen n’attendait. Je ne trouve pas d’autre mot pour caractériser les atrocités humaines et matérielles subies par les Tchadiens avant que l’aide extérieure ne vienne ; il faut un sursaut national pour venir en aide d’urgence aux sinistrés.
Après, il faut que le Gouvernement trouve des solutions pérennes dans l’aménagement du territoire, des villes afin de parer à toutes autres éventualités. Faudrait-il, pour parler de la ville de N’Djaména par exemple, proposer que la cité soit totalement restaurée, c’est-à-dire que les travaux de voirie urbaine inachevés prennent effectivement corps avant la survenue du prochain hivernage ? Les autorités municipales sont-elles ainsi interpellées afin que les obstructions des voies d’écoulement des eaux soient réparées au plus vite et qu’une vaste campagne de sensibilisation contre l’incivisme de certains habitants de la capitale soit lancée ? Au besoin, la coercition peut être requise pour discipliner les citoyens récalcitrants. Même si cette situation d’intempérie exceptionnelle cette année ne frappe pas que le Tchad, les services techniques du pays doivent se mobiliser avec des moyens conséquents qui leur sont fournis, bien sûr, par l’État, pour prévenir et contenir les futures fortes précipitations et les effets collatéraux qu’elles occasionnent.
En juin 2023, le président de votre parti, l’ancien Premier ministre de Transition et actuel médiateur de la République, Saleh Kebzabo, a été porté à la tête du Comité Afrique de l’Internationale socialiste. Pensez-vous que l’idéologie socialiste a de l’avenir, surtout en Afrique ?
Célestin Topona Mocnga : C’est en effet la conviction politique de l’UNDR qui, dès sa création en avril 1992, a jeté les jalons de son orientation idéologique. Nous sommes partis d’un constat tout simple. Notre comportement culturel envers nous-mêmes, Tchadiens, est social sans que nous nous en rendions compte. [sc4] Les actes de la vie que nous posons tous les jours dans nos villes, villages et ferricks sont d’ordre social ; et la façon de gérer notre convivialité traditionnelle l’est aussi, et cela, du nord au sud et de l’est à l’ouest. Nous avons donc, à l’UNDR, estimé que la voie la plus élaborée à suivre sur le plan des idéologies du monde contemporain auquel nous appartenons est celle du socialisme ou de la social-démocratie, comme on veut. C’est pourquoi le bureau exécutif de l’UNDR a eu le feu vert du 5e congrès tenu à Moundou en 2014 pour préparer l’entrée du parti à l’International socialiste. Chose actée en 2017 à Carthagène, en Colombie, lors du 25e congrès de cette organisation internationale de pensée politique de gauche. Le président national de l’UNDR et ses camarades de l’exécutif du parti ont alors pris leurs bâtons de pèlerin pour assister à nombre de conférences et autres forums de l’Internationale socialiste, tant en Afrique qu’en Europe et en Asie. Cela s’est soldé par une adhésion effective, comme je l’ai dit tantôt, couronnant ainsi plusieurs années d’explications envers les partenaires, son programme politique y relatif en main.
Comme toute idéologie, chacun est libre de son opinion, mais à l’UNDR nous pensons que le socialisme est susceptible de nous aider à penser politiquement autrement les conditions du développement économique, social et même culturel de l’Afrique.
La visibilité que nous essayons de donner au parti sous la bannière socialiste mérite d’être largement expliquée aux militants. C’est ce que les dirigeants essaient de faire chaque fois que des séminaires de formation à cet effet sont organisés.
Notre persévérance, pour ne pas dire notre sérieux, a été récompensée par le comité Afrique, qui a élu à sa tête le président national de l’UNDR, Saleh Kebzabo, lors de sa réunion des 17 et 18 juin 2023 à Niamey au Niger.
En plus de l’honneur que cela nous procure, c’est surtout la reconnaissance de notre dynamisme par les partis politiques d’obédience socialiste ou sociodémocrate de tout le continent, et partant, la visibilité du Tchad, qui se renforce parce qu’une de ces organisations politiques a vu sa stature se hisser à la tête de l’Afrique. Pendant son mandat de cinq ans, le président Saleh Kebzabo va œuvrer pour la consolidation de la solidarité socialiste du continent pour une démocratie véritable. L’UNDR souhaite aussi que les partis politiques tchadiens de cette sensibilité s’organisent pour faire partie de l’IS. Une tentative à ce sujet a été initiée par le bureau exécutif et nous ne désespérons pas que les efforts pour fédérer les partis politiques qui le souhaitent reprennent bientôt.
Tout cela relève du volontariat de chaque parti qui doit se préparer à des contraintes qu’il faut respecter scrupuleusement. C’est le prix à payer pour être crédible et entrer dans le cercle politique international.
La Russie poursuit sa percée diplomatique et militaire dans plusieurs pays africains. En janvier dernier, le président Mahamat Idriss Déby s’est rendu à Moscou, où il a été reçu en grande pompe par son homologue, Vladimir Poutine. Est-ce à dire que le Tchad est en train de vouloir tourner le dos à la France pour se rapprocher de la Russie ?
Célestin Topona Mocnga : La position de l’UNDR est claire au sujet du positionnement stratégique du Tchad. Parmi les défis de tous ordres que le pays est appelé à relever, le Tchad doit diversifier ses relations avec tous les pays, partenaires au développement, qui respectent sa souveraineté et qu’ils respectent aussi.
Je sais que vous vous focalisé aussi sur nos rapports avec la France. Avec tout ce qui se développe en ce moment dans le Sahel, la position du Tchad, qui fait partie intégrante du Sahel, est scrutée avec intérêt. Pour le moment, je ne décèle pas de tumulte public particulier des relations Tchad-France et les accords de coopération bilatéraux ne sont pas rompus.
Que le président Mahamat Idriss Déby Itno se rendre en visite en Russie n’est que normal, comme il s’est rendu aussi en France et dans d’autres pays amis. Il vient d’effectuer une autre visite en Hongrie, le 8 septembre, au retour du Forum de la coopération sino-africaine qui s’est tenu à Pékin les 6 et 7 septembre. Je pense que le Tchad, État souverain et épris de paix et de justice sociale, doit se positionner sur l’échiquier mondial sans complexe. Il doit viser la préservation de ses propres intérêts économiques, sécuritaires et autres d’abord, sans faire d’ingérence dans les affaires d’autres pays. Et les autres pays ne doivent pas également non plus s’immiscer dans ses problèmes intérieurs.
Le partenariat et la coopération internationale ont leurs règles que chaque pays respecte et applique dans le cadre des intérêts réciproques. Tel est en tout cas la position politique de l’UNDR qui encourage le gouvernement du Tchad à ne voir que ce qui peut aller dans le sens du développement du pays. Jusqu’à présent, notre pays ne s’est pas adossé de façon aveugle à telle ou telle position de blocs antagonistes. Si la Russie peut continuer à aider le Tchad, nous l’y exhortons, tout comme la France – partenaire traditionnel et privilégié s’il en est, qui est lié à notre pays par l’histoire. Les questions d’État à État sont gérées avec responsabilité, mais pas sur les réseaux sociaux.
Pour le moment, il n’y a que des spéculations qui circulent sur les réseaux sociaux, des supputations d’un changement éventuel du Tchad. Par rapport à quelle situation stratégique mondiale ? Je ne sais. À ma connaissance, la diplomatie tchadienne n’a pas changé et le Tchad n’a de mauvaises relations avec aucun pays. Le multilatéralisme constitue le fondement de la démocratie des pays qui cherchent leur émergence dans le concert des Nations. C’est le cas du Tchad ; et l’UNDR, qui est dans cette logique, encourage les autorités à développer de bonnes relations avec les pays qu’elles estiment amis.
Certaines voix au Tchad, notamment au sein de la Coalition Wakit-Tama, demandent le départ des soldats français du Tchad. Quelle est la position de l’UNDR ?
Célestin Topona Mocnga : L’organisation que vous citez, à ce que je sache, se réclame de la société civile. Si ce que vous affirmez est vrai, à quel titre légitime peut-elle se prévaloir pour faire la demande que vous rapportez ? L’UNDR est représentée dans le Gouvernement. Son président, après sa haute fonction de Premier ministre sous la Transition, est maintenant médiateur de la République, une institution importante du pays ; ne vous attendez donc pas à ce que le parti se désolidarise de ce qu’il a contribué à mettre en place pour sauver la paix et l’unité au Tchad. Toutefois, nous sommes en démocratie et les opinions contradictoires peuvent s’affronter. C’est dans ce sens que je voudrais répondre à votre question. Le jour où les autorités légitimes (dont nous-mêmes) prendront une décision extraordinaire ou spectaculaire, vous le saurez.
À quand le prochain congrès de l’UNDR ?
Célestin Topona Mocnga : Le 7e congrès devrait se tenir avant l’élection présidentielle du 6 mai 2024, précisément fin février. Tous les délégués des 23 provinces étaient déjà arrivés à N’Djaména pour cela. Mais des circonstances indépendantes de notre volonté, sur le plan pratique, ne nous ont pas permis de le tenir comme nous le faisons habituellement. Néanmoins, ces délégués qui constituent le socle du parti, y compris ceux des dix arrondissements de la capitale, ont donné quitus au bureau exécutif national de battre campagne pour le candidat Mahamat Idriss Déby Itno, légitimant du même coup l’appartenance formelle de l’UNDR au sein de la coalition des partis politiques pour un Tchad uni.
La dernière annulation du Congrès est expliquée par la non-utilisation du palais des Arts et de la Culture, ex Palais du 15 janvier, par l’UNDR. De même que l’impossibilité pour nous de faire transporter les délégués de la ville de N’Djaména sur le lieu des travaux, parce que la circulation dans la ville de N’Djaména était hypothéquée, à cause des affrontements entre les forces de l’ordre et les éléments du président du Parti socialiste sans frontières, Yaya Dillo (le 28 février 2024).
Ayant loué les infrastructures du bâtiment précité qui coûte cher, le comité d’organisation ne pouvait attendre plusieurs jours avant que le congrès ne se tienne, tout comme les frais de transport des délégués de provinces (une centaine) qui rendent prohibitif deux fois leur aller-retour de leur base à N’Djaména . Le congrès était prévu pour trois jours et, au 4e jour, une réunion de tous les délégués des provinces s’est tenue au domicile du président national qui a entériné, après débat, les propositions du bureau exécutif. C’est ce que le congrès convoqué à cet effet allait faire.
Le congrès programmé se tiendra bien, car nous n’allons pas aux élections législatives sans l’aval statutaire des organes de base du parti. Si nous devons sceller une alliance quelconque avec d’autres partis, il nous faut l’aval du congrès.
Voilà tout sur le congrès. Nous n’avons rien à cacher, tant le respect scrupuleux des textes de l’UNDR est devenu notre seconde nature. Je ferme aussi cette page spéculative à ce sujet.