Les enjeux d’une dissolution de l’Assemblée nationale

La dissolution de l’Assemblée nationale est sur toutes les lèvres depuis l’adresse à la nation du chef de l’État. Actée le jeudi 12 septembre 2024, elle alimente les débats en ce vendredi 13 septembre, jour qui devait coïncider avec la déclaration de politique générale (DPG) du Premier ministre.

En effet, par décret en date du 4 septembre, le président de la République avait convoqué l’Assemblée nationale en session extraordinaire, en réponse à la menace d’une motion de censure brandie par la majorité du parlement. En s’appuyant sur l’article 84 de la Constitution, qui accorde la priorité au chef de l’État pour l’inscription d’une proposition de loi à l’ordre du jour, Bassirou Faye, le président de la République, avait demandé l’ouverture de cette session extraordinaire.

La tenue de la DPG, prévue pour le 13 septembre par la Conférence des présidents et acceptée par le chef de l’État, laissait planer le doute sur une possible dissolution de l’institution parlementaire avant cette date. L’annonce de la dissolution, intervenue hier, a rapidement provoqué des réactions du côté du groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar (BBY). Son président, Abdou Mbow, a dénoncé dans un communiqué une « indignité républicaine ». Selon lui, « en décidant de dissoudre l’Assemblée nationale en pleine session extraordinaire qu’il a lui-même convoquée et à la veille de la déclaration de politique générale dont il avait fixé la date, le président de la République a commis un parjure, exécutant de manière cynique les instructions de son Premier ministre ».

Pour Moustapha Fall, un étudiant trouvé devant un kiosque à journaux, la dissolution de l’Assemblée nationale était inévitable. Selon lui, la 14e législature a été marquée par des comportements sans précédent en termes de manipulation des institutions. « On a tout vu, tout entendu avec cette Assemblée nationale », ajoute-t-il, soulignant que certains actes de cette législature resteront gravés dans la mémoire des Sénégalais.

Aminata, une citoyenne, partage cet avis et estime que le président n’avait pas d’autre choix que de dissoudre l’Assemblée, estimant que le bras de fer entre l’exécutif et le législatif avait trop duré. Pour elle, ceux qui dénoncent cette décision comme un « parjure » sont simplement des mécontents.

Les avis divergent, que ce soit chez les hommes politiques, les experts ou les simples citoyens. Dans son allocution, le président a mis fin au suspense en annonçant des législatives anticipées pour le 17 novembre prochain, bouleversant ainsi le calendrier électoral.

Qu’en sera-t-il du processus électoral ?

Selon l’expert électoral Ndiaga Sylla, la dissolution de l’Assemblée nationale et l’organisation des législatives anticipées auront un impact sur le calendrier électoral. Le délai de validation et de publication des listes de candidats, prévu 60 jours avant le scrutin, sera raccourci, de même que la date de dépôt des candidatures, fixée à 85 jours avant les élections. Il rappelle qu’il avait appelé à un compromis entre les acteurs pour éviter de torpiller les délais constitutionnels.

Cependant, Ndiaga Sylla admet que l’option du président d’installer une nouvelle Assemblée avant la fin de l’année est une bonne hypothèse. Cela permettrait de lancer la session budgétaire avant la fin de l’année. Néanmoins, il prévient que cette situation compliquera la préparation technique des élections, notamment l’impression des bulletins de vote, la constitution des listes de candidatures, et surtout, le respect des obligations liées au parrainage, risquant de provoquer une multiplication des candidatures.

Par ailleurs, certains observateurs, comme Anta Babacar Ngom, ancienne candidate à la présidentielle, y voient une manœuvre politique visant à concentrer le pouvoir. L’opposition, à travers des figures comme Thierno Bocoum, président de AGIR, dénonce une « soumission indécente envers le Premier ministre ». De leur côté, les partisans du président se préparent à la bataille pour remporter ces législatives, considérant qu’une victoire serait essentielle pour mettre en œuvre leur projet de bonne gouvernance.

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