Trois mois ferme et une amende de cent mille (100 000) francs CFA pour l’activiste Bah Diakhate et l’Imam Cheikh Tidiane Ndao au Sénégal. Le verdict est tombé hier lundi (03 06 2024) au tribunal des flagrants délits de Dakar.
Me. Amadou Sall, avocat de la défense, parle « d’une justice non rendue et d’une condamnation sévère » au vu de ce qui leur est reproché.
Cependant pour le pénaliste Papa Ahmadou Mbaye, le droit a été dit même si les avocats disposent du droit de faire une interprétation en faveur de leurs clients.
« La peine est acceptable pour la bonne et simple raison que l’infraction de diffusion de fausses nouvelles a été retenue conformément à l’article 255 du code pénal » d’après lui.
Mbaye estime qu’à partir du moment où les hommes politiques sont écoutés de tout bords, leurs prises de paroles doivent faire l’objet de propos qui ne doivent pas faire enfiler la désinformation.
Dès lors les propos de Diakhaté et Ndao jugés discourtois à l’endroit de hautes autorités du pays ont fait que le juge a jugé nécessaire d’appliquer cette condamnation, la peine étant bien proportionnée par rapport au dossier.
Pour rappel, les mis en cause ont été successivement interpellés par la Division des Investigations criminelles (DIC) il ya deux semaines après des sorties dans des videos où le premier nommé avait lancé des attaques contre le premier ministre Ousmane Sonko sur le thème de l’homosexualité après la visite de l’opposant de gauche français Jean Luc Mélenchon.
Pour le prêcheur, il dénonçait la complaisance dont a fait montre le premier ministre vis-à-vis du même thème.
Des interpellations qui ont d’ailleurs incité les organisations de défense des droits de l’homme a demandé la dépénalisation de ces types de délit.
En effet Amnesty Sénégal réclame depuis des années que ces délits passibles d’emprisonnement soient supprimés.
Mais pour le formateur en droit, aller vers une dépénalisation n’est pas une bonne démarche.
Selon Ahmadou Mbaye cela risquerait de laisser libre cours à des interprétations qui vont fuser de partout.
Un libertinage dans la prise de parole en public serait du point de vue du pénaliste de donner la licence à certains individus mal attentionnés pour déverser des insanités sur des personnes.
L’idéal étant même d’aller dans une logique de corser les dispositions c’est-à-dire « faire en sorte qu’à chaque fois qu’un homme politique ou un professionnel dans son discours ne puisse porter atteinte à des institutions ou à d’honnêtes gens ».
Et sur ce qui spéculent sur le délit « d’offense au premier ministre la jugeant de politique, le juriste est parfaitement d’accord puisque la disposition en tant que telle ne parle pas d’offense au premier ministre.
Elle dit plutôt qu’en vertu de l’article 254 alinéa 2 qui parle « d’offense à une personne qui exerce tout ou partie des prérogatives du Président de la République ». Ce qui fait amalgame selon ce dernier.
Le premier ministre dans la nomenclature institutionnelle partage avec le président de la République un certain nombre de prérogatives relativement le contre fait du premier ministre, d’après Mbaye.
Il apporte un éclairage a ce niveau notamment sur la signature de décret du président de la République.
Avec comme précision : pour que ce décret soit valide en droit il faut obligatoirement qu’il soit contre signé par le premier ministre ce qui est appelé une prérogative par tâche.
Par ailleurs, un seul chef d’inculpation a finalement été retenu par le juge : celui de diffusion de fausses nouvelles.
L’accusation d’offense à une personne exerçant tout ou partie des prérogatives de chef de l’État a, elle, été rejetée. Une accusation qui avait été particulièrement contestée par les avocats des prévenus, Ousmane Sonko étant Premier ministre et non pas président.
Les avocats de la défense ont immédiatement annoncé vouloir interjeter appel.
Pour eux, cette condamnation à de la prison ferme est beaucoup trop sévère, sachant qu’aucun des deux prévenus n’avaient jamais eu affaire à la justice auparavant.