Beaucoup de rumeurs couraient sur sa possible nomination à la tête de la direction de la Radiodiffusion Télévision Sénégalaise (Rts) au lendemain de l’élection de Bassirou Diomaye Faye. La nouvelle est tombée mercredi soir en conseil des ministres.
Une nomination qui est intervenue parmi tant d’autres, pour des personnalités supposées avoir subi les affres de l’ancien régime de Macky Sall.
Pape Alé Niang va diriger la télévision publique, sous le feu des critiques sévères depuis de nombreuses années. Il aura donc l’occasion de redorer le blason de la RTS. En effet, il est reproché à la télévision nationale en l’occurrence à son ex directeur son militantisme pour l’ex désormais parti au pouvoir, l’Alliance pour la République (APR).
Une télévision qui ne respecte pas la notion de service public donc point d’équilibre dans le traitement de l’information, la primeur étant donnée aux activités gouvernementales, peu d’intérêt accordé a l’opposition.
De nombreux défis au menu
Pape Alé Niang, c’est le journaliste connu pour son franc parler, pointu et engagé. Il lui est d’ailleurs même prêté des accointances avec les nouvelles autorités du temps où ceux-ci étaient encore dans l’opposition. Ce qu’il a toujours balayé d’un revers de main.
Sa notoriété, il le doit au groupe Sud Communication, la première radio privée du Sénégal où il aura passé ses plus beaux jours de la profession.
L’homme capte l’attention des auditeurs à travers sa revue de presse quotidienne, par sa pertinence et ses émissions très écoutées. S’en suivra une carrière où il fera le bonheur de plusieurs rédactions : il enchaîne les télévisions privées du pays : la 2S TV, Walfadjri TV et Sen TV avant de mettre en place plus tard un site d’informations qu’il dirige actuellement : « Dakar Matin. »
Le journaliste, défenseur des droits humains est connu pour ses articles réguliers sur l’actualité sénégalaise dénonçant la corruption, la mauvaise gouvernance et défendant les droits civils et politiques d’opposants persécutés. Des scoops qu’il donne sur des pontes du régime lui valent alors des arrestations.
Une première en novembre 2022 puis en décembre de la même année pour divulgation d’informations susceptibles de « nuire à la défense nationale et diffusion de fausses nouvelles » dans une chronique sur l’opposant Ousmane Sonko.
Il est libéré en janvier, placé sous contrôle judiciaire après avoir observé une grève de la faim l’ayant affaibli.
Une autre arrestation s’en suit le 29 Juillet 2023. Cette fois, il lui est reproché d’avoir commenté dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux l’arrestation de Ousmane Sonko.
Pape Alé est placé en garde à vue, poursuivi pour appel à l’insurrection. Le monsieur s’engage dans une grève de la faim aux conséquences fâcheuses sur son état de santé pour dénoncer une décision arbitraire.
Ses incessantes détentions vont susciter des vagues de contestations et de solidarité de la part de la corporation du pays et même de l’étranger. Il sera finalement libéré et placé sous contrôle judiciaire.
Reporters sans Frontières avait alors dénoncé la persécution judiciaire d’un journaliste critique incarcéré trois fois en moins d’un an.
Le patron de Dakar matin va plusieurs fois en pleine détention, être hospitalisé du fait d’un état de santé inquiétant.
La récente publication de « Amnesty International » dans son rapport 2023 accable le Sénégal sur la situation des droits humains et libertés bafouées.
Une belle part est réservée à notre pays et fait état d’une liberté de presse piétinée du fait des arrestations arbitraires subies par bon nombre de journalistes durant l’ère Macky Sall. Le cas de Pape Alé Niang n’est pas en reste.
Aujourd’hui à la tête d’une télévision qui reçoit des critiques acerbes de la part de citoyens mécontents, beaucoup de changements et de restructurations sur la gestion de la télévision sont attendus.
Réconcilier les citoyens d’avec leur télévision nationale, t’elle doit être le challenge pour Pape Alé Niang.
Reconnu comme un journaliste chevronné, engagé et professionnel, il semble investi d’une mission qui est celle de rendre à César ce qui est à César.
C’est dire toute l’importance de sa nouvelle mission. Une notion de service public comme le slogan de la rts l’indique « le public, notre raison d’être ».
Ndeye Aissatou Diouf