Révélations sur la récurrence des incendies en Guinée.

En Guinée, les incendies sont devenus monnaie courante. Le 18 décembre dernier, c’est le plus grand dépôt de carburant du pays qui avait pris feu à Kaloum, centre-ville de Conakry, la capitale. Récemment, trois autres lieux ont connu le même sort.

Il s’agit de deux installations de la Société nationale d’électricité et d’une réserve de carburant destinée au marché noir. Ce qui amène à penser que certaines de ces tragédies sont d’origine « criminelle » et « volontaire ».

Après l’incendie à Kaloum qui a causé une trentaine de morts et de nombreux blessés, le gouvernement d’alors avait annoncé des enquêtes. Depuis, quatre mois se sont écoulés et les investigations promises n’ont toujours pas livré leurs conclusions. Le chef de la transition, le général Mamadi Doumbouya, avait pourtant assuré que la lumière serait faite sur ce qui s’est passé.

Mais visiblement, les victimes n’y croient plus. Leur manque de confiance vis-à-vis du tombeur d’Alpha Condé est parti du présumé détournement du don d’argent et de matériels qui leur était destiné. D’après elles, seulement quelques denrées, principalement des sacs de riz, avaient été mises à leur disposition. En ce qui concerne la reconstruction de leurs concessions ou de leur recasement, c’est encore au point mort.

Moussa Cifoké Touré, président du Comité des sinistrés de Kaloum, en pleine action pour la reconstruction de sa concession touche

« Ceux qui ont détourné l’aide en faveur des sinistrés ne peuvent jamais lutter contre les détournements dans le pays . On ne nous a distribué que des sacs de riz. Les sommes d’argent et les matériels offerts, on n’a rien vu. Tout a été détourné. C’est nous-mêmes qui nous chargeons de la reconstruction de nos maisons. Bientôt 5 mois, nous dormons dans la rue », témoigne Mamoudou Cifoké Touré, président du Comité des sinistrés des hydrocarbures de Coronthie.

Pourquoi tant d’incendies à Conakry ? C’est une question dont une partie de la réponse semble du ressort de l’EDG (Électricité de Guinée). Mais chez cette société nationale de production et de fourniture du courant, bien que deux de ses installations à Conakry aient été récemment ravagées par des feux dont l’origine n’est toujours pas déterminée, son directeur a décliné notre demande d’interview avec lui, ajoutant qu’il parlera le moment opportun.

En Guinée, il existe une société spécialisée dans le gardiennage et la protection. Les incendies font partie de ses domaines d’intervention. Elle est dénommée LAGUIPRESS. Dans ses locaux, un des responsables s’est prêté à notre micro sous l’anonymat.

« La plupart des incendies dans lesquels nous sommes intervenus, l’origine, ce sont les courts-circuits. Ces courts-circuits sont souvent provoqués par des mauvais branchements d’une part et des variations par moments de la tension d’autre part. Mais dans d’autres cas, rien qu’en regardant de très près les dégâts, on comprend que c’est expressément fait. C’est-à-dire, on se rend compte que ça a été volontairement provoqué par des personnes de mauvaise foi. Je vous donne un exemple : Un magasin de stockage de pneus a pris feu à la T8 pendant le mois de Ramadan. Beaucoup ont dit que c’était parti d’un court-circuit. Mais, moi, je me dis que c’est plutôt un acte criminel. Je vous dis ça par expérience. On n’a pas besoin d’être enquêteur pour comprendre l’origine de certaines choses », dit l’interlocuteur anonyme.

Mamoudou Tounkara est un sociologue guinéen. Dans notre série d’interviews sur la récurrence des incendies en Guinée, il a été parmi les personnes abordées.

« Savoir avec exactitude ce qui pousse à des incendies volontaires ou criminels, c’est vraiment quelque chose de très difficile. Seule une enquête bien menée peut faciliter à le savoir. Mais très malheureusement, en Guinée, les enquêtes dans ce sens n’aboutissent jamais ou leurs conclusions ne sont jamais portées à la connaissance du public. Je peux citer on peut citer le mauvais caractère, la jalousie et la haine comme éléments pouvant pousser un individu à commettre un incendie », indique le sociologue

Chez les citoyens aussi, les avis divergent sur la récurrence des incendies dans le pays. Mais les plus nombreux parmi ceux que nous avons interrogés soutiennent que cesi tragédies « sont volontaires et criminelles ». En tout cas, pour ce qui est de la quantité de plantations incendiées à Kindia courant 2023, il est arrivé que des individus soient arrêtés et présentés comme responsables.

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