Un rapport publié par l’Initiative globale contre le crime organisé (GI-TOC) met en cause la stratégie de cryptomonnaie adoptée par le président Faustin-Archange Touadéra en République centrafricaine.
Présentée comme une solution innovante pour stimuler l’économie et attirer les investisseurs, cette politique serait, selon l’ONG, loin de profiter à la population. Elle aurait au contraire ouvert la porte à des intérêts privés et à des réseaux criminels étrangers, fragilisant la souveraineté économique du pays.
Des promesses ambitieuses, une réalité contestée
En 2022, la RCA avait créé la surprise en adoptant le bitcoin comme monnaie légale et en lançant le projet Sango Coin, censé permettre la tokenisation des ressources naturelles – mines, forêts, terrains – afin de financer des infrastructures et moderniser l’économie. Le président Touadéra avait présenté cette initiative comme une « révolution financière » pour un pays où l’accès aux services bancaires reste limité.
Mais dans un contexte où moins de 15 % de la population dispose d’un accès à Internet, la GI-TOC estime que cette stratégie n’a bénéficié qu’à une minorité, renforçant les élites et accentuant les inégalités.
Des réseaux criminels dans la boucle
Le rapport va plus loin : il accuse le programme crypto d’avoir facilité la mainmise de groupes privés et criminels sur les ressources nationales. Parmi eux, des réseaux étrangers, dont le groupe russe Wagner, déjà impliqué dans des activités minières et accusé de violations des droits humains en Centrafrique. Selon l’ONG, l’absence de cadre réglementaire solide a favorisé des pratiques opaques, allant jusqu’au blanchiment d’argent et à la corruption.
« Le programme de cryptomonnaie en RCA a consolidé le pouvoir de l’élite et ouvert la voie à des activités criminelles », déclare Nathalia Dukhan, experte de GI-TOC.
Pour l’ONG, la tokenisation des ressources naturelles représente un risque majeur : celui de brader la souveraineté économique du pays au profit d’acteurs privés et de réseaux transnationaux. À l’approche de l’élection présidentielle prévue le 28 décembre, cette question devient hautement sensible. Le rapport appelle à une régulation stricte, à des audits publics et à une supervision parlementaire pour éviter une dérive irréversible.
Les autorités centrafricaines n’ont pas officiellement réagi. Un responsable, sous couvert d’anonymat, a qualifié le rapport de « tentative de discrédit », affirmant que la stratégie crypto vise à offrir une alternative au système bancaire traditionnel, jugé trop restrictif pour la population.






