Les trois pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) ainsi que la Guinée, multiplient les arrestations, enlèvements, poursuites judiciaires et attaques ciblées contre les journalistes, les militants et les acteurs de la liberté d’expression. Une situation qualifiée de rétrécissement de l’espace civique par une étude de la Media Foundation for West Africa (MFWA).
Mali : enlèvement, exécutions et intimidation
Dans la région du Sahel, déjà éprouvée par le jihadisme, la répression s’ajoute à l’insécurité. Au Mali, la créatrice de contenus Mariame Cissé, suivie par près de 100 000 abonnés sur TikTok, a été enlevée puis exécutée publiquement le 7 novembre à Tonka, dans la région de Tombouctou. Connue pour ses vidéos valorisant la culture locale, elle avait affiché un soutien aux autorités et aux FAMA, ce qui lui aurait valu l’hostilité de groupes armés.
Seydina Oumar Traoré, DG de Baoulé FM, condamné pour « outrage à un chef d’État étranger » suite à des propos visant le président guinéen Mamady Doumbouya. Il a été libéré le 26 novembre 2025 après un an de procédure dont six mois avec sursis. Malick Aliou Maïga, de Radio Aadar Koïma, interpellé le 5 novembre à Gao puis relâché sans explication. El Bachir Thiam, enlevé le 8 mai 2025 près de Kati-Koto, finalement libéré. Les militants politiques ne sont pas épargnés. Issa Kaou Djim a purgé un an de prison et payé 1 million FCFA d’amende après avoir dénoncé sur Joliba TV une tentative de coup d’État déjouée au Burkina Faso.
Burkina Faso : disparitions prolongées et répression
Au Burkina Faso, la MFWA recense également des cas récurrents d’intimidation. Les journalistes Adama Bayala et Alain Traoré dit “Alain Alain”, portés disparus pendant plus d’un an, ont été libérés le 16 septembre 2025. Les circonstances de leur arrestation demeurent floues.
Niger : loi sur la cybercriminalité utilisée pour museler la presse
Au Niger, l’étude souligne une instrumentalisation de la législation sur la cybercriminalité afin d’entraver le journalisme indépendant. Le 30 octobre 2025, sept personnes dont six journalistes ont été interpellées à Niamey suite à la fuite d’un communiqué gouvernemental.
Si quatre ont été libérés, trois autres, Omar Kané, Issoufou Seriba et Ibro Chaibou, ont été placés sous mandat de dépôt à la prison de Kollo après l’audience du 3 novembre, poursuivis pour « complicité de diffusion d’un document susceptible de troubler l’ordre public ».
Guinée : pression sur la presse et atteintes aux proches
En Guinée Conakry, dirigée également par une junte, la presse indépendante est dans la ligne de mire.
À N’Zérékoré, Elhadji Adama Keita, père du journaliste d’investigation en exil Mamoudou Babila Keita, a été enlevé le 29 septembre à l’aube. Le journaliste Djiba Milimono, du groupe Hadafo Media, a été placé en détention pendant une semaine après une altercation avec un blogueur pro-régime.
Le groupe de presse Lynx-Lance a subi deux attaques ciblées sur ses installations d’impression, les 7 et 18 octobre, paralysant ses activités.
La MFWA interpelle les organisations régionales
Face à la multiplication des violations, la MFWA appelle la CEDEAO, l’Union africaine, les organisations de défense des droits humains et les partenaires internationaux à agir pour la protection des journalistes.
La media foundation for west Africa insiste sur l’urgence de préserver la liberté civique et l’indépendance des médias au Sahel et en Guinée, où les régimes militaires renforcent leur contrôle.
Alioune SOW







