Le président kényan William Ruto a dévoilé jeudi un ambitieux programme de grands travaux évalué à 33,4 milliards d’euros, soit près de 28 % du PIB national, afin de moderniser les infrastructures et stimuler la croissance. Une annonce qui suscite scepticisme et interrogations dans un pays confronté à une dette écrasante et à une pauvreté persistante.
Dans un discours à la nation, M. Ruto a affirmé vouloir construire 50 méga-barrages en cinq à sept ans pour « augmenter considérablement la production d’énergie », tout en modernisant routes et aéroports. Le plan inclut également des investissements dans l’éducation, l’accès à l’eau et la transition numérique.
« Nos perspectives s’éclaircissent et la confiance dans le Kenya augmente », a déclaré le président, mettant en avant la maîtrise de l’inflation et la hausse des exportations sous son mandat.
Un financement incertain
Le chef de l’État compte mobiliser des fonds via des privatisations, réinjectés dans un fonds national d’infrastructure, et attirer des investisseurs privés, notamment des fonds de pension et souverains. Objectif : un effet de levier de 1 pour 10, soit dix shillings privés pour chaque shilling public.
Mais pour Aly-Khan Satchu, expert financier, cette stratégie reste « une perspective lointaine à ce stade ». L’économiste XN Iraki juge le plan « trop ambitieux », rappelant que le montant annoncé équivaut à la moitié de la dette nationale.
Un contexte social explosif
Depuis son arrivée au pouvoir en 2022, William Ruto promettait des améliorations rapides pour la jeunesse kényane. Pourtant, les réalités économiques demeurent : un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté, et chaque année, un million de jeunes arrivent sur le marché du travail sans trouver d’emploi déclaré.
Les tensions sociales se sont accentuées en 2024 et 2025, avec des manifestations meurtrières contre de nouveaux impôts, la corruption et les violences policières.
Un pari risqué pour l’avenir
Alors que le Kenya consacre davantage au remboursement de sa dette qu’à la santé et à l’éducation, ce plan colossal soulève une question centrale : peut-il réellement transformer la vie quotidienne des Kényans ? Pour XN Iraki, « l’important est ce que les gens ordinaires ressentent : emplois, loyers, nourriture et autres nécessités ».
B.B






