Trois ans après la disparition de l’adjudant-chef Didier Badji et du sergent Fulbert Sambou, un premier suspect a finalement été inculpé. Jérôme Bandiaky, alias Sniper, a été placé sous mandat de dépôt pour séquestration et assassinat des deux militaires. Il est également poursuivi pour menaces de mort et violences contre un témoin clé, dont les révélations ont permis de relancer un dossier longtemps figé.
Une disparition qui remonte à novembre 2022
Les faits datent du 18 novembre 2022, lorsque Badji et Sambou disparaissent soudainement. Une enquête est rapidement ouverte et confiée à la Section de recherches de la gendarmerie.
Cinq jours plus tard, le corps de Fulbert Sambou est retrouvé au large du Cap Manuel. Celui de Didier Badji, lui, n’a jamais été retrouvé, alimentant de nombreuses interrogations sur les circonstances exactes de leur disparition.
Les familles n’ont cessé, depuis lors, de réclamer la vérité et de dénoncer les lenteurs de l’enquête. Le 16 novembre dernier, à l’occasion d’une messe et d’une marche commémorative, leurs proches ont réitéré leur demande de justice et de transparence.
Un tournant dans l’enquête
La veille de cette commémoration, un tournant survient : Jérôme Bandiaky est inculpé.
Ce 18 novembre, troisième anniversaire de la disparition des deux militaires, marque ainsi la première avancée judiciaire concrète dans une affaire restée sans réponse pendant des années.
Le procureur avait pourtant communiqué dès novembre 2022, indiquant que la géolocalisation des téléphones des deux militaires les situait près des falaises du Cap Manuel, où avaient été retrouvés un filet de pêche, des appâts et des chaussures leur appartenant. Quelques jours plus tard, il confirmait la découverte du corps de Sambou, identifiée par sa famille.
Une autopsie n’avait pas été réalisée, le corps étant jugé trop dégradé, même si le parquet affirmait qu’il ne présentait “aucune trace de violence”, une contradiction qui avait soulevé de nombreuses interrogations.
Silence institutionnel et drames personnels
Depuis la disparition, la Gendarmerie comme l’Armée n’ont jamais communiqué publiquement sur l’affaire.
La famille de Didier Badji a été particulièrement éprouvée : son épouse est décédée d’un cancer, emportée alors qu’elle réclamait encore la vérité sur le sort de son mari. Leurs enfants, aujourd’hui orphelins, sont privés du salaire de leur père depuis 2022.
Pendant près de trois ans, le dossier est resté sans évolution notable, jusqu’à ce réquisitoire supplétif visant Bandiaky, ancien proche du couple présidentiel sous Macky Sall.
Les commanditaires toujours inconnus
Malgré l’arrestation du premier suspect, une question centrale reste entière : qui a commandité ces crimes ?
Pour l’heure, aucun commanditaire présumé n’a été identifié, entendu ou inquiété.
Les enquêteurs n’ont avancé aucun nom, les autorités n’ont fourni aucune explication et aucun acte de procédure ne semble viser d’éventuels responsables hiérarchiques ou politiques.
Pour les familles, cette absence de réponses laisse planer l’ombre d’un crime organisé dont seuls les exécutants seraient aujourd’hui visés.
Une quête de vérité toujours inachevée. En effet, l’arrestation de Jérôme Bandiaky marque une étape, mais elle ne clôt pas un dossier où demeurent de nombreuses zones d’ombre. Les proches des deux militaires, déterminés à poursuivre leur combat, affirment que tant que les commanditaires ne seront pas identifiés et jugés, la justice restera incomplète.
Alioune SOW







