À 92 ans, Paul Biya entame un huitième mandat, consolidant un régime ultracentralisé qui verrouille les institutions, contrôle l’armée et domine la scène politique depuis plus de 40 ans. Dans ce contexte, tout défi interne semble presque impossible. Pourtant, Issa Tchiroma Bakary, ancien fidèle du président et ex-porte-parole du gouvernement, choisit aujourd’hui de se faire entendre.
Tchiroma, longtemps voix officielle du pouvoir, adopte un ton critique inédit. Dans ses récentes interventions, il interpelle, questionne et dénonce certaines dérives, montrant qu’il n’est plus seulement un soutien silencieux. Pour beaucoup, cette posture traduit un bras de fer symbolique, entre fidélité passée et ambitions futures.
Mais le rapport de force reste inégal. Biya maîtrise le pouvoir exécutif, la machine administrative et les réseaux du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC). Tchiroma, lui, dispose d’une base régionale limitée et d’une influence médiatique plus symbolique qu’opérationnelle. À court terme, ses chances de renverser le président sont quasi nulles.
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Pourtant, son geste a une portée politique. Il teste les limites du système, inspire d’autres figures marginalisées et se positionne dans la perspective de l’après-Biya. Dans un contexte où la succession politique est anticipée mais jamais discutée ouvertement, Tchiroma prend date : il affirme sa présence et son rôle potentiel dans la recomposition future du pouvoir.
En réalité, ce bras de fer n’est pas une bataille pour aujourd’hui, mais un signal envoyé à tous ceux qui surveillent le jeu des alliances et des ambitions. Si Tchiroma ne peut battre Biya, il peut préparer sa légitimité pour demain, démontrant qu’une voix dissidente, même issue du sérail, peut encore se faire entendre dans un Cameroun verrouillé.






