Sa plume n’a pas de gants. Quand le célèbre écrivain guinéen décide de parler, les bruits de botte de la junte militaire se font entendre. Alors que le référendum en Guinée approche à grand pas, Tierno Monénembo brise le silence. Le lauréat du prix Renaudot dénonce les agitations du régime autoritaire et qualifie le référendum de “mascarade”. À 78 ans, l’intellectuel maintient le rythme de sa critique acerbe, affirmant être prêt à “mourir pour ses idées”.
Monénembo critique ouvertement le général Mamadi Doumbouya, à la tête de la junte, l’accusant de vouloir légitimer son coup d’État et de se maintenir au pouvoir indéfiniment. Alors que le régime suspend les partis politiques, réprime les manifestations et arrête des opposants, l’écrivain est l’une des rares voix à s’exprimer librement depuis la Guinée.
Il décrit le régime comme une “injustice au stade suprême”, où les droits n’existent plus et où les crimes sont “presque quotidiens”, citant notamment les disparitions forcées. L’écrivain raconte sa propre histoire tumultueuse avec la junte. Il a lui-même été victime de ces pressions et répressions, avec le vol de son ordinateur contenant le manuscrit d’un roman, un acte qu’il impute aux autorités.
Rien de nouveau pour Tierno Monénembo qui, depuis sa jeunesse, est la voix de sa génération. Après avoir fui la dictature d’Ahmed Sékou Touré en 1969, il a fait de son exil une source d’inspiration pour ses œuvres. Il a notamment écrit son premier roman pour dénoncer ce régime. Aujourd’hui, il promet de ne plus jamais fuir une dictature. Son optimisme est inébranlable, il croit fermement que la démocratie est la “pente naturelle de l’Histoire”, malgré le combat continu du peuple guinéen pour la liberté. Il regrette par ailleurs le “silence” de la France face à la situation, qu’il juge complice.
Après des mois de blocage, Monénembo annonce la publication de son nouveau roman d’ici la fin de l’année. Un ouvrage qui prend racine dans son environnement familial et remonte au moment de l’indépendance de la Guinée. Ce qui est, pour lui, une évidence, c’est “qu’on ne plonge pas deux fois dans la même rivière”.