L’ouverture de la COP 28 à Dubaï nous donne l’occasion de revenir sur la problématique des crédits-carbone dont on parle peu en Afrique. Pourtant, l’Afrique est concernée par le changement climatique et ses forêts sont convoitées par les firmes étrangères.
Sécheresses, inondations, désertification, insécurité alimentaire et accès difficile à l’eau : l’Afrique est l’un des continents les plus frappés par le changement climatique. Mais c’est aussi en Afrique que les discussions sur les crédits-carbone sont quasi inexistantes.
Adoptés il y a presque trente ans dans le cadre du Protocole de Kyoto, les crédits-carbone sont des certificats attribués pour chaque tonne de gaz à effet de serre compensée par un projet durable de protection de la nature. Le mécanisme encourage la réduction des émissions et participe à l’atténuation des effets du changement climatique.
Mais ce système de compensation a permis récemment à un pays pollueur comme les Emirats Arabes Unis d’acheter des millions d’hectares de forêts en Afrique qui lui offrent la chance de maintenir au même niveau ses émissions de gaz carbonique.
Une convoitise au relent colonial ?
L’achat de ces forêts pénalise alors les populations locales qui ne peuvent plus en exploiter le bois, comme c’est arrivé en Tanzanie, au Mozambique et au Liberia.
Dans ce dernier pays, une entreprise de Dubaï (Emirats arabes unis), Blue Carbon LLC, a acquis au printemps dernier, pour une période de trente ans, les droits exclusifs sur un million d’hectares de forêt, soit 10 % de la surface totale du Liberia.
Le principal argument en faveur des crédits-carbone est qu’ils constituent une rentrée d’argent pour les Etats les plus pauvres d’Afrique. Ainsi, selon certains experts, le continent pourrait récolter jusqu’à six milliards de dollars chaque année sur les marchés du carbone, soit une fois et demie le Produit intérieur brut d’un pays comme le Cap-Vert.
Mais les revenus actuels en sont encore éloignés et selon l’Initiative pour les marchés du carbone en Afrique (Africa Carbon Markets Initiative), les pays africains ont monétisé, en 2021, 22 mégatonnes d’équivalent CO2 pour à peine 123 millions de dollars.
Surtout, les crédits-carbone achetés par des pays riches sont critiqués par de nombreuses ONG comme étant une approche coloniale de la lutte contre le changement climatique, avec des forêts africaines convoitées par les plus grands pollueurs.