La première rencontre entre le tout nouveau président du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye et le Chef de l’Etat français, Emmanuel Macron a attiré toutes les attentions. Lors de cette entrevue, les deux Présidents ont échangé sur les défis communs à relever pour poursuivre et renforcer la coopération dans les secteurs qui contribuent à une plus grande souveraineté du Sénégal. Un tête à tête entre un président africain souverainiste et le président d’un ancien État colonisateur, qui a suscité le décryptage d’analystes.
« Il y a une dynamique de rupture qui est fondée sur ces valeurs de souveraineté. Les dirigeants sénégalais actuels se sont engagés à réaliser la souveraineté du Sénégal sur pas mal d’aspect. Par conséquent, le Président français tient ce discours pour se montrer plus ou moins en distanciation de ce qu’a été la politique française à l’égard de ses anciennes colonies, à savoir l’espace francophone », soutient le journaliste et analyste politique Docteur René Massiga Diouf ».
Selon l’analyste, la France essaie un peu de se mettre à l’ère du temps comme on dit, eu égard à sa situation très compliquée dans pas mal de pays de son pré-carré. On peut en citer, le Niger, le Burkina Faso et le Mali. Et la France ne veut pas perdre les deux pays avec qui elle entretient des relations bilatérales, à savoir le Sénégal et la Côte d’Ivoire.
Par conséquent, estime M. Diouf, la France est obligée de se mouvoir dans ce vent de changement. D’où cette adaptation aux discours officiels mais aussi aux politiques définies par les nouvelles autorités.
À l’occasion de ce premier échange, les deux chefs d’État ont exprimé leur volonté commune de donner une nouvelle impulsion au partenariat entre le Sénégal et la France, fondé sur un respect mutuel, un partenariat équilibré au service des intérêts réciproques des deux peuples, unis par des valeurs démocratiques partagées, par un lien humain et une relation d’amitié ».
Analysant l’aspect du contenu des échanges entre les deux chefs d’Etat, l’Enseignant chercheur en Sciences politiques à la Faculté de Droit Ucad, Jean Charles Biagui relève des « des formules très diplomatiques ».
« Je ne vois pas comment la France va aider le Sénégal qui fait tout pour se défaire des liens militaires et économique qui existent entre eux. Je me demande comment dans cette perspective ce pays (la France) dont les actions sont décriées peut aider notre pays qui veut s’émanciper de lui, à se libérer de sa tutelle et consolider une certaine souveraineté puisque ce sont ses liens politiques, militaires et économiques qui sont remis en cause », s’est interrogé Jean Charles Biagui.
Par contre, fait remarquer le politologue, « sur la forme, cette rencontre montre qu’il y’a incontestablement une rupture notamment dans la communication ».
Décryptant le cours des événements, Biagui constate que lors de cette visite du président Diomaye à Paris, « nous n’avons pas vu les images de présidents africains notamment sénégalais qui acceptent un paternalisme devant les télévisions du monde ».
Selon lui, « le président Bassirou Diomaye Faye s’est inscrit dans la perspective de rupture en ne faisant pas comme ses prédécesseurs, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade et Macky Sall avec des embrassades, accolades dans un langage avec des formules qui témoignent d’un lien colonial et un paternalisme accepté. Diomaye à Paris, nous n’avons pas vu ces images et il faut s’en féliciter. Au Sénégal, on peut espérer qu’on ne reverra plus ces images », a-t-il fait remarquer.
Pour le journaliste-formateur et spécialiste en communication politique, Bacary Domingo Mané, le président Diomaye Faye avait des idées clairs dans la tête, en se rendant à Paris.
« Le contexte géopolitique où une génération d’Africains décomplexés veut traiter d’égal à égal avec les anciens colons donne un cachet particulier à cette entrevue avec un jeune président porteur d’un projet panafricaniste-souverainiste. C’est pourquoi, au-delà du discours ou des mots, les gestes et les postures du Présidents Diomaye Faye sont scrutés pour se faire ou non une religion sur le projet dont il est porteur. » a souligné le spécialiste en communication politique.
Les présidents sénégalais Bassirou Diomaye Faye et français Emmanuel Macron sont convenus de renforcer les projets structurants dans divers secteurs dont la transition énergétique, la santé, la formation professionnelle, la production locale de vaccins et l’agriculture.
A.K. Coulibaly