La Guinée se prépare à un nouveau scrutin présidentiel et les enjeux sont de taille face au Général Mamadi Doumbouya. Mais une candidate ose s’affirmer et briguer la magistrature suprême pour la deuxième fois consécutive : Makalé Camara. Forte d’une carrière impressionnante, elle revendique son droit « régalien » et sa légitimité à diriger le pays.
Malgré les pronostics, quelle stratégie compte adopter cette figure chevronnée de la politique pour mobiliser le peuple et notamment les femmes et la jeunesse ? Comment compte-t-elle se démarquer dans un contexte aussi polarisé ? Makalé se livre, à cœur ouvert, dans cet entretien exclusif accordé à LNA.
Makalé Camara : Parce que c’est mon droit régalien de me présenter aux élections présidentielles en tant que citoyenne. Je m’étais déjà présentée en 2020. Je pense que c’est normal que les femmes prétendent à diriger leur pays quand elles s’impliquent, tel que je le fais depuis que je suis commis de l’État. Oui, je pense que c’est le couronnement de ma carrière. Trois fois ministre, deux fois ambassadeur, députée, chevalière de l’ordre national du Mérite. Je pense que je suis à ma place.
LNA : Vous dites que vous avez votre place parmi les candidats mais quelle stratégie adoptez-vous pour gagner face au général Mamadi Doumbouya, candidat du pouvoir et donné favori pour gagner par tous les observateurs sociopolitiques guinéens et extérieurs ?
Il ne faut pas être limité par les risques. Je pense qu’il faut oser quand on n’ose pas, quand on ne prend pas de risque, on ne va pas à une compétition. La stratégie que j’adopte, c’est de faire l’immersion au sein du peuple, surtout avec les femmes, dans les marchés, dans les ports, partout où je peux trouver les femmes. Je vais les chercher, partout où je peux trouver les jeunes, je vais les chercher. Je suis dans ma voiture comme ça, en train d’aller dans la zone minière de Boké pour parler aux populations touchées, au monde estudiantin, au monde féminin, au monde paysan. Il faut faire le corps à corps, il faut faire le porte-à-porte.
Il faut parler à la population pour qu’ils sachent choisir avec discernement.
LNA : Mais franchement, est-ce que vous pensez gagner face à un régime militaire qui a pour candidat Mamadi Doumbouya ?
L’important, c’est de participer. Vous savez, il y a des politiciens qui ont lutté 40 ans. J’en veux pour exemple le professeur Alpha Condé. J’en veux pour exemple le président Mitterrand. L’important, c’est de marquer la mémoire collective de son empreinte, n’est-ce pas ?
Oui, on va aller à la compétition. Que le meilleur gagne, c’est tout. Que le meilleur gagne !
LNA : C’est la deuxième fois que vous vous présentez à l’élection présidentielle dans votre pays, la Guinée. La première fois ne vous a pas réussi. Dans quelle mesure il est important pour vous d’être présente chaque fois qu’il y a justement une compétition aussi importante pour l’avenir de la Guinée en tant que femme, en tant que femme.
Les femmes doivent marquer leur présence dans l’échiquier politique de leur pays. Prendre toute leur part dans les joutes électorales de notre pays. Il faut être là, il faut être présent. Je suis la seule femme qui est retenue. Je pense que c’est déjà une victoire d’avoir une femme dans ce lot. Sur 51 candidats dont neuf retenus, une seule femme, c’est déjà une première victoire.
Je pense que le fait de participer, le fait d’être là est un exemple, est un rôle modèle pour les autres femmes qui, pour la plupart du temps, ont du mal à s’impliquer en politique. Il faut tracer le chemin et un jour je réussirai, un jour une autre réussira. Il faut le faire. Il faut qu’il y ait des pionnières.
LNA : Est-ce que vous avez confiance au processus électoral d’autant plus que c’est le ministère de l’Administration territoriale qui organise ces élections et qui est donc avec le pouvoir de Conakry ?
Vous savez, c’est pas nouveau, la France, c’est le ministère de l’Administration du territoire qui organise les élections. Je pense que le ministère sera assez équitable pour organiser ces élections. En tout cas, il faut faire avec. C’est le système que nous avons. Il ne faut pas être limité par ci, par ça. Faut pas être limité par les obstacles, il faut y aller, il faut se confronter, il faut s’immerger, il faut se battre, il faut conquérir. Il faut être là pour savoir quelle est la vérité. Donc moi je ne suis pas limitée par quoi que ce soit. Je m’implique dans ces élections, je fais ma campagne, je vous l’ai dit, je suis sur la route de Boké, comme ça, dans ma voiture, je continuerai jusqu’au fin fond du pays.
L’important pour moi, c’est de participer surtout, mais de marquer la conscience collective et d’être cet exemple-là. Pour les femmes qui ne doivent pas toujours avoir peur des obstacles. Il faut les transcender, il faut y aller, il faut avancer dans la vie.







