L’Afrique est redevenue, au XXIe siècle, un champ de bataille diplomatique où se croisent ambitions économiques, sécuritaires et géopolitiques. Si la Chine, la Russie et les États-Unis dominent la compétition pour les ressources et l’influence, un phénomène plus discret se dessine : l’offensive des « petits » États européens, longtemps absents du continent, qui cherchent à se tailler une place dans ce nouvel ordre mondial.
Un repositionnement stratégique de l’Union européenne
Face aux revers subis par les anciennes puissances coloniales – notamment la France, fragilisée par la rupture avec plusieurs pays sahéliens –, l’Union européenne a dû revoir sa copie. Objectif : maintenir son statut de « partenaire de premier plan » de l’Afrique. Mais ce retour en force ne se limite plus aux grandes capitales. Des pays comme la Finlande, l’Estonie, la Hongrie ou la République tchèque s’imposent désormais comme des acteurs dynamiques.
L’atout de l’histoire : la carte de la neutralité
Ces États jouent sur un argument clé : leur absence de passé colonial. Certains vont plus loin en valorisant leur propre expérience d’émancipation face à des puissances dominatrices. « Nous ne sommes pas perçus comme le grand oppresseur du passé », confie un diplomate européen. Pour l’Estonie, ancienne république soviétique, cette mémoire de la transition démocratique devient un levier pour établir des relations « horizontales » avec des partenaires africains.
Des initiatives ciblées et pragmatiques
Les exemples se multiplient : ouverture d’ambassades par la Finlande au Sénégal, déploiement d’expertise numérique estonienne en Namibie et en Ouganda, formation des forces de sécurité mauritaniennes par des instructeurs tchèques, implantation hongroise au Tchad avec une mission humanitaire et bientôt militaire. Ces démarches traduisent une volonté de diversification, à la fois diplomatique et économique.
Des ambitions commerciales en croissance
Bien que modestes, les chiffres témoignent d’une dynamique : le commerce de l’Estonie avec l’Afrique a presque doublé depuis 2019, celui de la Hongrie a progressé de 35 %, et l’ensemble de l’UE affiche une hausse de 25 %. La Finlande vise même à doubler ses échanges avec le continent d’ici 2030.
Un pari risqué mais stratégique
Ces initiatives ne sont pas sans défis : manque de ressources, réseaux diplomatiques embryonnaires, concurrence féroce des puissances globales. Mais elles révèlent une tendance lourde : l’Afrique n’est plus seulement un terrain d’influence pour les grandes nations, elle devient un espace où les « petits » États européens testent leur capacité à exister sur la scène internationale.







