Pendant plus de dix ans, Maiduguri, capitale de l’État nigérian de Borno, a incarné la violence et l’insécurité. Attentats-suicides, fusillades nocturnes et couvre-feux stricts rythmaient alors le quotidien de ses habitants, sous la menace permanente de Boko Haram et de sa faction rivale, l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP). Aujourd’hui, la ville connaît une métamorphose spectaculaire.
Depuis 2021, Maiduguri n’a subi aucune attaque majeure. Les marchés regorgent à nouveau d’activité, les taxis-tricycles – les célèbres keke – parcourent les artères en tous sens, et les jeunes jouent au football jusqu’à tard le soir, scène inimaginable il y a seulement quelques années. L’installation de stations de recharge pour véhicules électriques symbolise cette normalisation progressive, tandis que restaurants et lieux de socialisation rouvrent leurs portes.
Une paix précaire et contestée
Cette accalmie a un prix élevé. Couvre-feux maintenus, points de contrôle militaires, arrestations massives et exécutions extrajudiciaires – dénoncées par plusieurs ONG – constituent l’envers du décor sécuritaire. Les pick-ups militaires demeurent omniprésents dans les rues, et l’interdiction des motocyclettes, ancien vecteur d’attaques jihadistes, a durablement modifié les habitudes de mobilité.
Les campagnes, parent pauvre de la sécurisation
La menace reste pourtant bien réelle aux portes de la ville. Lors du reportage de l’AFP, sept soldats ont trouvé la mort dans une attaque de l’ISWAP à seulement 35 kilomètres de Maiduguri. Selon l’ONG GGA, le groupe jihadiste a pris le contrôle d’au moins dix-sept positions militaires dans le nord-est du Nigeria au cours du premier semestre 2025. Dans le camp de déplacés d’El Miskin, comme dans bien d’autres, des milliers de personnes survivent dans des conditions précaires, privées d’écoles, d’activités économiques et de terres cultivables. L’État de Borno compte aujourd’hui près de 700 000 enfants privés d’éducation.
Si Maiduguri incarne désormais la résilience d’une population déterminée à revivre, sa normalisation reste fragile. La persistance des attaques de Boko Haram et de l’ISWAP dans les zones rurales voisines rappelle que la reconstruction sociale et économique du bassin du lac Tchad constitue un défi de longue haleine.
B.B







