Le ministre des Finances et du Budget, Cheikh Diba, a annoncé que le Sénégal lancera bientôt des Diaspora-Bonds. Ces obligations citoyennes, destinées exclusivement aux Sénégalais de l’extérieur, seront proposées dans le cadre du prochain Appel Public à l’Épargne (APE) prévu le 18 septembre 2025. L’objectif est clair : mobiliser directement l’épargne de la diaspora pour financer des projets structurants, en faisant d’elle un acteur privilégié de la transformation nationale.
L’idée des Diaspora Bonds est à saluer. Elle permet à l’État de mobiliser une épargne abondante et souvent disponible, tout en associant la diaspora au développement national.
Les rendements proposés sont généralement très intéressants. On aurait même pu envisager des taux plus bas, car le patriotisme et la foi religieuse de nombreux Sénégalais auraient suffi à motiver leur souscription, sans qu’il soit nécessaire d’offrir des conditions aussi généreuses.
Les Diaspora Bonds libellés en franc CFA présentent un attrait particulier. Le CFA étant arrimé à l’euro, le risque de change est quasi nul dans ce cas. C’est à la fois un choix rationnel pour l’investisseur et un acte patriotique pour soutenir la stabilité de notre monnaie.
Si les obligations sont émises en dollar, le risque de change n’est pas éliminé :
Si le dollar se déprécie, la valeur des coupons (intérêts) baisse en CFA.
Si le dollar perd de la valeur au moment du remboursement du capital, la diaspora subit une perte tandis que l’État réalise une plus-value.
À l’inverse, une appréciation du dollar profite à la diaspora mais entraîne une moins-value pour les finances publiques.
Dans tous les cas, ce mécanisme transfère le risque de change entre l’État et sa diaspora. Mais au niveau global, c’est le Sénégal qui gagne : l’un profite, l’autre compense, et la collectivité nationale y trouve son compte. Comme on le dit bien chez nous : « Deureum bi guénoul galgui ».
Au-delà des prêts, la diaspora peut aussi devenir actionnaire dans des projets lucratifs et visibles. Dans ce cas, les ressortissants d’un terroir donné seront particulièrement motivés à participer au développement local. On peut imaginer :
une centrale solaire,
un péage traversant leur terroir,
un hôpital semi-privé,
une ferme villageoise moderne.
Ce type d’investissement renforcerait à la fois le sentiment d’appartenance et l’impact direct sur les populations.
Ainsi, les Diaspora Bonds ne doivent pas seulement être un instrument de financement de la dette, mais un véritable levier de développement partagé. L’État y gagne en ressources, la diaspora en revenus et en fierté, et le pays en infrastructures et en emplois.
Pr Amath Ndiaye
FASEG-UCAD