Alors que dans le monde les démocraties croulent sous l’impulsion fulgurante du poids des inégalités, l’urgence pour l’Afrique est dans la réinvention de ses modèles économiques selon des experts du secteur. C’est ce qui découle de la conférence qui s’est déroulée ce mardi 17 juin à Dakar au musée des Civilisations noires.
Cette rencontre, qui a réuni chercheurs de renom de la trempe d’Achille Mbembé, historien et politologue, de l’universitaire et économiste Felwine Sarr, ou encore Faizel Ismail, directeur de la Nelson Mandela Scholl of public governance, UCT, acteurs institutionnels et représentants de la société civile venus de pays différents en partenariat avec l’Agence Universitaire de la Francophonie et la Fondation de l’Innovation et de la Démocratie, a servi de tribune pour établir un diagnostic des modèles économiques et des enjeux de développement de l’Afrique.
Autour du thème « Démocratiser l’économie: un horizon de réinvention des modèles économiques au service d’une démocratie substantive en Afrique », la conférence, qui est un avant-goût de la tenue prochaine des Assises de la démocratie, s’est voulue un cadre d’échanges sur comment repenser l’économie africaine. Parce qu’il est difficile de parler de revitalisation de la démocratie sans penser à l’économie. Et il serait inconcevable de trouver les réponses à comment démocratiser l’économie en une journée, estime l’enseignante politiste de l’université Gaston Berger de Saint-Louis au Sénégal.
Mame Penda Ba estime aujourd’hui indispensable pour les Africains de se poser des questions radicales de manière à ce que les dirigeants et acteurs de la société civile puissent comprendre ce concept mais à travers des mots simples.
Aujourd’hui, en tant qu’Africains, il urge de solutionner ce qu’elle appelle une « défaite » qui dure depuis trop longtemps et se demander pourquoi nous n’arrivons pas toujours à nous en sortir.
Pour l’écrivain et philosophe Felwine Sarr, « la comparaison faite entre l’économie africaine et celle des autres est certes bien, mais il faut surtout partir de nos réalités historiques, culturelles et anthropologiques. Bien apprendre des autres, évidemment, est important, ajoute l’économiste. Toutefois, cela ne signifie pas « répéter ce que les autres ont fait ».
« Ça ne veut pas dire être en autarcie. Il faut, bien sûr, regarder le monde, mais ça veut dire avoir les bons termes de la comparaison et comprendre ce qui est utile à son processus économique personnel », a-t-il souligné.
Le grand défi, selon lui, est de repenser notre modèle économique de manière critique.
Que gagnerait l’Afrique dans une économie démocratisée ?
L’enseignant-chercheur à Duke University dit préférer que les acteurs voient comment repenser l’économie africaine plutôt que parler de démocratisation. Et cela, pour lui, passe d’abord par son histoire, mais ensuite par le choix d’un modèle d’économie du bien-être.
Il y a lieu de revoir un modèle qui n’assure pas la prospérité et le bien-être du plus grand nombre, qui ne réduit pas non plus les vulnérabilités, encore moins offre de l’emploi. L’articulation des besoins et des ressources ne peut se faire sans regarder nos réalités mais il faut aussi nécessairement inclure les acteurs concernés pour une bonne économie de nos sociétés, conclut Felwine Sarr.