Sociologue de développement et expert en gouvernance et développement local, Dr Cyrille Mahoussi ADANKANHOUNDE a mené une réflexion approfondie sur le Vodun. Au lendemain des Vodun Days 2025, la chaine privée béninoise Radio Sêdohoun s’est intéressée à la substance de cet article de l’universitaire. L’auteur s’est penché sur,notamment, le Vodun, la culture et les rapports entre les hommes.
Selon Dr Cyrille Mahoussi ADANKANHOUNDE, dans nos sociétés actuelles, un phénomène attire l’attention. Il s’agit des « chrétiens qui constituent une partie importante de nos communautés et manifestent souvent une certaine réticence à s’approcher ou à contribuer aux manifestations culturelles liées au culte Vodun. En revanche, lors des actions de grâces organisées dans les églises, il n’est pas rare de voir des dignitaires et des chefs traditionnels, pourtant gardiens de nos cultures, participer activement et y apporter des contributions substantielles. Cette situation soulève des questions profondes sur la place de nos cultures dans une société où les influences religieuses et culturelles s’entrelacent. »
Dieu et la culture, une opposition imaginée ?
Le sociologue du développement se fait un peu plus clair dans ses propos. « Il est important de noter que les gardiens de nos traditions culturelles, y compris ceux liés au culte Vodun, reconnaissent généralement l’existence de Dieu, ou d’une force créatrice suprême. Dans l’ouvrage Vodun expliqué à ma fille du professeur Dodji AMOUZOUNVI, l’auteur illustre que le Vodun n’est rien d’autre qu’une manifestation des éléments de la nature créés par Dieu. Ainsi, l’opposition perçue entre le Vodun et la foi chrétienne pourrait être une construction sociale plutôt qu’une réalité spirituelle. Mais alors, Dieu a-t-il voulu la destruction de nos cultures ? Si nous croyons en un Dieu qui est amour et harmonie, pourquoi voudrait-il effacer les cultures qui valorisent et célèbrent sa création sous différentes formes ? Il semble plutôt que c’est l’homme, dans sa quête de domination culturelle et religieuse, qui a imposé une dichotomie artificielle entre spiritualité et culture. »
Le Vodun, un pilier de l’économie locale ?
« Au-delà de l’aspect spirituel, le Vodun est aussi un moteur économique important. Prenons l’exemple des Vodun Days à Ouidah : cet événement attire des milliers de visiteurs locaux et internationaux, dynamisant l’économie locale. Les commerçants, artisans, hôteliers, restaurateurs et bien d’autres secteurs bénéficient directement de cet afflux. Le Vodun, au-delà de ses connotations spirituelles, est donc un levier puissant pour le développement économique. À titre de comparaison, observons l’économie dégagée par le pèlerinage à La Mecque. Ce grand rassemblement religieux bénéficie non seulement à l’Arabie saoudite, mais aussi à toute une chaîne économique allant des agences de voyage aux fabricants d’articles religieux. Pourquoi ne valoriserions-nous pas davantage nos propres pratiques culturelles qui ont un potentiel similaire ? »
Le sociologue de développement et expert en gouvernance et développement local préconise toutefois la réflexion en ce qui concerne la redéfinition du rapport aux cultures et traditions. Nos manifestations culturelles, comme le Vodun, ne sont pas nécessairement en opposition avec la foi chrétienne ou musulmane. Elles peuvent coexister et même s’enrichir mutuellement, tout en contribuant à notre développement économique et identitaire. », explique-t-il avant son invite.
« Chrétiens, musulmans, gardiens des traditions, il nous appartient de travailler ensemble pour célébrer nos richesses culturelles tout en reconnaissant leur potentiel spirituel et économique. « En soutenant nos cultures, nous soutenons aussi notre identité collective et notre prospérité commune. »
Sidoine AHONONGA
