La semaine passée, la Cour suprême du Tchad a mis un terme à une décision de la Haute autorité des médias et de l’audiovisuel (Hama) qui avait pour but d’interdire la diffusion et la création de contenus audiovisuels sur les médias numériques. En réponse à la décision de la Hama, les médias en ligne ont opté pour une grève prolongée qui a conduit à l’absence de couverture de la campagne électorale en préparation des élections législatives, provinciales et locales du 29 décembre 2024.
En entretien exclusif, Bello Bakary Mana, à la fois président de l’Association des médias en ligne (AMET) et PDG du Groupe Ialtchad Médias, répond aux interrogations de Lesnouvellesdafrique.info. (Ialtchad se traduit par les enfants du Tchad en arabe local, tel que parlé au Tchad, ndlr).
Lesnouvellesdafrique.info : L’ordonnance de la Cour suprême qui a suspendu la décision de la Hama est-elle une victoire pour l’AMET?
Bello Bakary Mana: Oui, c’est une victoire de l’AMET en première étape. Une victoire inédite et flamboyante. On la dédie aux journalistes tchadiens.
Lesnouvellesdafrique.info: est-ce la fin de votre bras de fer avec l’organe de régulation de la presse tchadienne?
Bello Bakary Mana: Est-ce la fin du bras de fer, comme vous le dites? Pour nous, c’est la fin d’une première étape, celle du jugement en référé qui suspend cette décision inique, illégale et injuste. Le droit a été dit.
Lesnouvellesdafrique.info: il ne reste plus que quelques jours de campagne avant les élections législatives, locales et provinciales du 29 décembre. Est-ce que les médias tchadiens en ligne ont décidé de lever le mot d’ordre de grève suite à la décision de la Hama?
Bello Bakary Mana: Oui. L’AMET a levé la grève mardi 24 décembre à minuit. Durant deux semaines de grève, nous avons payé le prix de la liberté. On a décidé de s’arrêter là tout en respectant la journée de lundi 23.
Lesnouvellesdafrique.info: Dans quel environnement fonctionnent les médias tchadiens en ligne?
Bello Bakary Mana: Dans un environnement compliqué, surtout en ce qui attrait au modèle économique. Nous n’avons toujours pas trouvé un modèle viable qui permettrait à ces entreprises d’être pérennes. À l’Amet, nous réfléchissons. Voilà une idée que la Hama devait prendre à bras le corps au lieu de passer son temps à violer les lois et à s’ériger en père fouettard. Son rôle est certes la régulation, mais pas la répression des médias.
Lesnouvellesdafrique.info: l’Association des médias en ligne (AMET) ne bénéficie-t-elle pas d’une subvention de l’État?
Bello Bakary Mana: L’Amet, à ce jour, ne perçoit aucune subvention de l’État.
Lesnouvellesdafrique.info : Vous n’êtes pas que président de l’Association des médias en ligne (AMET). Vous êtes aussi le président-directeur général (PDG) du groupe Ialtchad Médias. Parlez-nous de votre entreprise de presse.
Bello Bakary Mana: Ialtchad Presse, c’est l’histoire d’une vie avec un ami et frère. Nous l’avons fondé en 1999. C’est le premier média en ligne tchadien de toute une génération. Ialtchad Presse signifie la presse des enfants du Tchad. C’est un nom qui parle aux gens, qui les touche , qui est inclusif. C’est une histoire d’amour avec nos lecteurs. Elle dure et vit encore à travers nos chroniques, nos éditoriaux, nos portraits, etc. C’est un style unique. Lisez-les, vous saurez le pourquoi.
Lesnouvellesdafrique.info: La plateforme des organisations des médias a restitué ce 24 décembre, à la Maison des médias, les badges et gilets remis par la Haute autorité des médias et de l’audiovisuel (HAMA) pour la couverture de la campagne et des élections législatives et locales du 29 décembre. C’est pour protester contre l’absence de subvention par l’Etat aux médias pour la couverture de la campagne et de ces scrutins. Est-ce que l’AMET s’associe à cette démarche?
Bello Bakary Mana: Non, l’Amet n’est pas associée à cette démarche. Cette affaire engage ceux qui l’ont initiée. Nous avons souffert seuls pendant presque deux semaines. Nous avons gagné notre combat, ou du moins la première mi-temps de ce combat. Et nous gagnerons la deuxième mi-temps de ce combat si la Hama s’entête à aller au procès en jugement de fond. Nous appelons la Hama à annuler cette décision.
Propos recueillis par Papa Barry