Pour les élections législatives anticipées du 17 novembre prochain, aucune femme n’est en tête sur les listes malgré la loi sur la parité adoptée en 2010 visant à l’équilibre homme-femme dans la sphère politique.
Des progrès ont certes été réalisés grâce aux efforts fournis pour encourager une participation qualitative des femmes à l’hémicycle mais lors des dernières élections législatives de 2022, sur les 165 sièges à pourvoir, les femmes n‘ont occupé que 73 places soit une représentativité de 44 %.
Le Sénégal, un bon élève ?
Le pays occupe la quatrième place au niveau africain et la dix-huitième sur le plan mondial d’après le classement de l’Union parlementaire, augurant une évolution du taux de représentation des femmes au sein de l’hémicycle. En dépit de ces avancées, qu’est-ce qui explique alors qu‘aucune femme ne soit tête de liste pour ces législatives ?
Problèmes logistiques et financiers
Pour la présidente du Conseil sénégalais des Femmes (Cosef), cette sous-représentativité peut être vue sous plusieurs angles. D’abord, il y a les délais de préparation réduits qui sont défavorables à la participation des femmes.
Seynabou Guèye Mbaye estime aussi que l‘autre défi reste l’obstacle des ressources financières. En réalité, les femmes font face généralement à des difficultés pour rassembler des moyens logistiques et financiers afin d’être présentes sur le terrain. Enfin, le dernier défi est aussi la visibilité des messages des candidates, moyen essentiel d’être entendu pour la quête des voix dit-elle.
Ainsi le Cosef a initié un atelier pour outiller les femmes candidates pour ces législatives du 17 novembre afin de faire face aux défis.
Pour la chargée de programme gouvernance et coordinatrice de Onu Femmes, il est nécessaire de créer un environnement favorable à la participation des femmes aux élections, soulignant l’urgence de mener des innovations concrètes qui viseraient à maintenir une tendance croissante de la représentation féminine. Même si la Loi sur la parité instaurée a fait naître l’existence d’un cadre juridique propice, il reste que cette sous-représentativité des femmes fait toujours débat au Sénégal, pays considéré comme un bon élève en matière de parité en politique. Ces acquis sont mis à mal par les réalités du pouvoir et les forces d’inertie sociales.
Les hommes toujours en ligne de mire
Quarante et une liste, tous des hommes, peut conduire à une baisse de la représentation des femmes pour la prochaine législature estime Seynabou Gueye Mbaye. Celle-ci pense aussi que même si la parité est respectée sur les listes de candidature, cette garantie ne sera pas forcément le cas à l’arrivée. À chaque fois qu’une liste aura un député, ce sera un homme, s’il s’agit de trois députés, ce sera deux hommes, une femme, explique-t-elle.
Pour sa part, l’ancienne Première ministre du Sénégal salue le combat des femmes sénégalaises dans la participation politique. Aminata Touré considère que les femmes doivent occuper aujourd’hui leur place dans le dispositif décisionnel du pays et cela se fait à bas âge. Cette recherche démarre par l’engagement communautaire qui les forge à devenir leaders, ajoute-t-elle.
Selon le dernier recensement de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), les femmes représentent 49,8 %. Une proportion qui leur donne un droit de regard sur le budget et sur les autres préoccupations au niveau parlementaire.
Elles disposent des capacités d’être présentes de manière égalitaire dans toutes les sphères de la nation, selon la haute représentante du Président de la République.
Pour la présidente du Cosef , le rôle des députés femmes est crucial dans le relais des aspirations des populations quant à l’amélioration de leur prise en charge.
« Les femmes figurent toujours parmi les plus assidues lors de l’adoption du budget et des autres lois », fait-elle remarquer.
Des occasions saisies pour interpeller l’exécution des engagements de l’exécutif sur la mise en œuvre des politiques publiques. Et lors des dernières législatures, certaines d’entre elles se sont bien illustrées dans leur mission de contrôle de l’action gouvernementale en posant beaucoup de questions écrites, dit Mme Mbaye.
En revanche, même si la loi sur la parité est déjà excellente, elle doit être renforcée par d’autres lois, selon Aminata Touré. Ceci permettra de consacrer la parité sur toutes les sphères de décision, que ce soit pour le gouvernement ou les conseils d’administration.
« La participation politique, c’est également le choix des citoyennes dans leur engagement et l’exercice de leurs droits », conclut Mme Touré.