Le Burkina Faso face à la terreur des djihadistes

Des civils massacrés, des personnes déplacées, et parmi eux des chrétiens tués ou violés. Les groupes armés islamistes au Burkina Faso ont intensifié leurs attaques. C’est ce qu’a révélé l’ONG Human Rights Watch dans son rapport publié ce mercredi 18 septembre 2024.

Le rapport documente sept attaques au cours desquelles au moins 128 civils ont été tués depuis février 2024. Selon Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior à Human Rights Watch, ces événements constituent de graves violations des droits humains.

Pour la chercheuse, ce rapport ne représente qu’une fraction des exactions commises par ces groupes islamistes liés à Al-Qaida et à l’État islamique.

« Nous avons documenté plusieurs attaques et représailles dans lesquelles des témoins nous ont rapporté que leurs villes ou villages avaient été ciblés par les groupes jihadistes. Ces représailles visent souvent des communautés locales soupçonnées de collaborer avec les forces de sécurité ou les auxiliaires de l’armée, les VDP (Volontaires pour la défense de la patrie) », explique-t-elle. Elle ajoute que les attaques contre les civils se sont intensifiées, notamment contre ceux qui refusent de rejoindre les rangs des jihadistes mais collaborent avec les troupes gouvernementales et les VDP.

Certains villageois ont également affirmé que leurs communautés avaient été ciblées et que plusieurs personnes avaient été tuées après que les autorités les aient forcées à retourner dans des zones abandonnées où certains avaient rejoint les VDP. Les deux principaux groupes armés islamistes, qui contrôlent de vastes régions du Burkina Faso, continuent de dicter leur loi.

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Madame Allegrozzi décrit une situation humanitaire catastrophique au Burkina Faso, qualifiant la crise actuelle de « pire crise humanitaire de l’histoire » du pays. Avec environ 10% de la population déplacée à l’intérieur du pays – soit environ 2 millions de personnes –, la chercheuse souligne que le pays fait face à une situation extrêmement précaire avec des services sociaux de base débordés, aggravant ainsi les besoins humanitaires.

« Cette crise de grande ampleur, qui sévit au Burkina Faso, n’apparaît pas en première page des grands titres. C’est également l’une des crises les plus négligées au monde, avec une attention et un financement insuffisants de la communauté internationale », déplore-t-elle.

Quant à la réponse de la junte militaire face à cette escalade djihadiste, Ilaria Allegrozzi note que celle-ci a opté pour une approche militaire stricte, faisant de la lutte contre le terrorisme le cœur de sa politique. « C’est une politique essentiellement militaire, avec un effort de mobilisation générale pour regagner les territoires perdus. Toutefois, elle estime que cette lutte devrait être accompagnée de solutions non militaires : dialogues, négociations, et actions humanitaires en faveur des populations déplacées. » Elle avertit qu’une approche purement militaire risque d’aggraver la situation, en particulier si les opérations militaires conduisent à des exactions contre les civils, des disparitions forcées, et d’autres abus. Ces frustrations pourraient pousser davantage de personnes à rejoindre les rangs des groupes armés.

Quelles actions pour les acteurs régionaux afin de protéger la population ?

« Les bilans du conflit au Burkina Faso reflètent les défis auxquels se heurtent les réponses régionales africaines face à la violence, tant dans le pays que dans l’ensemble de la région du Sahel », souligne Ilaria Allegrozzi. Elle critique l’Union africaine, en particulier le Conseil de paix et de sécurité ainsi que la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, pour ne pas avoir suffisamment abordé la crise au Burkina Faso, notamment en ce qui concerne les abus commis dans le cadre du conflit.

Selon elle, l’Union africaine devrait jouer un rôle plus actif, en s’attaquant à la recrudescence des atrocités, en améliorant la protection des civils, et en obtenant justice pour les violations commises. Elle suggère également que la Commission des droits de l’homme mène des enquêtes sur les abus en cours et propose des moyens pour traduire les responsables en justice.

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