À Dakar, les motos communément appelées « jakarta » ont fini par se faire un nom dans la circulation. De marque KTM, importées d’Asie. Partout dans les intersections, on peut facilement les apercevoir.
À Ouakam par exemple, dans chaque arrêt, à l’image des traditionnels car rapide et bus, ces conducteurs y ont érigé leurs sites de stationnement. Ce, parfois de manière illégal. Circulant également dans les routes de la capitale sans casque et parfois même avec des frein défaillants au péril de leurs vies.
Reportage.
Dans ce célèbre arrêt de la Cité Avion appelé Boutique Nar (à l’Ouest de Dakar), le trafic est dense.
En cette matinée où le thermomètre affiche 29°, cette partie de la cité est trépidante.
De la musique, des cris, des camions, des bus, des voitures 7 places et même les motos Jakartas qui se faufilent entre les premiers cités font la navette à la recherche de potentiels clients.
« Dangay dem han » (besoin de moto-taxi en français), peut-on entendre.
Ici, la concurrence est rude.
Cherif est livreur, il assure également le transport de clients à ses heures perdues. Il pointe du doigt la simplicité de l’activité. De son avis, c’est parceque tout le monde est devenu conducteur et livreur que le secteur du transport connaît cette expansion. « C’est devenu tellement facile d’être conducteur de nos jours. Il faut avouer que le secteur n’est pas normalisé », regrette t-il.
À Dakar, la forte demande de services de ces moyens de transports a comme créé un nouveau créneau que des jeunes investissent. Une activité qui procure des revenus importants. Cherif, ne dit pas le contraire.
Le jeune homme, la vingtaine, suggère toutefois, que l’Etat revoit ce secteur qui est de plus en plus prisé par les jeunes.
« Je ne suis pas contre mes collègues conducteurs, mais je suis d’avis que les Jakartas ne sont pas fait pour la capitale. La hausse des accidents en témoigne. Il est impératif que l’Etat régularise le secteur », explique -t’il
Il ajoute que la majorité des conducteurs de ces Jakartas viennent du monde rural dont les réalités ne sont pas tout a fait les mêmes que dans la capitale. Il y’a le code de la route à respecter alors qu’ils ne le maîtrisent pas. Ils conduisent comme ils le sentent et gâchent notre activité avec les prix qu’ils fixent aux Clients.
L’Insécurité et l’indiscipline : Les deux principaux maux
C’est devenu un secret de polichinelles, l’insécurité qui provient de ces deux roues.
En effet, il ne se passe pas une semaine sans qu’il n’y ait un accident de circulation. Les uns plus grave que les autres, engendrant le plus souvent mort d’hommes.
Prenant conscience de ce fait, Aminata, élève en classe de première n’emprunte jamais ces moyens de transport. De son avis, « sa vie vaut plus que ces moto-taxis », explique t-elle.
D’après des statistiques fournies par le chef de la Division prévention, prévision, planification des catastrophes naturelles, de la Brigade nationale des sapeurs-pompiers, en 2020, plus de 100 personnes sont mortes du fait des accidents de la circulation avec cyclomoteur.
La majorité des conducteurs de moto-taxis conduit avec d’énormes risques.
À en croire Cherif, nombreux sont les conducteurs qui ont « des freins défaillants et ils en sont conscients. Ils sont juste intéressés par l’argent qu’ils peuvent gagner ».
Sans compter les cas de vol qui sont une mauvaise publicité pour les Jakartamans. En effet, la confiance n’est pas toujours de mise « entre les usagers et les conducteurs de ces motos », confesse le jeune homme.
Le chômage, principal facteur
À l’image du Sénégal, au Mali et en Côte d’Ivoire également l’avènement des mototaxis dans la ville a crée un engouement sans précédent au sein de la jeunesse oisive. Beaucoup de jeunes chômeurs virent en cette activité lucrative, l’épilogue de leur manque d’emploi et même de leur sous-emploi. Ainsi, des jeunes se sont lancés dans l’activité comme employés de l’entreprise Telimani, une initiative de taxi-moto de la société routière privée du même nom, des particuliers ou encore dans le cadre de l’auto-emploi pour ceux qui possèdent une moto. Ces moto taximen avec ou sans papiers officiels assurent le transport des usagers de la route, des écoliers. L’apport de ces « motos-taxi » est diversement apprécié par la population. Mais les textes peinent à être appliqués pour la réglementation du secteur. C’est dans cette optique que le gouvernement avait lancé une opération spéciale de délivrance des permis de conduire, cartes grises et plaques d’immatriculation. Cette campagne s’était poursuivie jusqu’en août 2022.
En 2023, le ministère ivoirien des Transports a annoncé l’interdiction de ces engins à trois roues dans le district d’Abidjan.
« Ces individus ne disposent d’aucune autorisation émanant de l’ Etat, des autorités du district d’ Abidjan ou des communes qui le composent », avait rapporté le communiqué rendu public.
Le ministère des Transports avait donc formellement demandé à toutes les personnes exerçant le transport de moto-taxi à « procéder à l’ arrêt immédiat de leurs activités sous peine de voir leurs moyens de transport être mis en fourrière sans préjudice des amendes et sanctions pénales prévues par les textes en vigueur ».
Ndeye Mour Sembene