Tribune : L’école est restée inadaptée aux besoins de l’Afrique francophone

L’école Africaine telle que nous la connaissons dans son organisation et sa structuration actuelles, a été introduite par la puissance coloniale, dans le but de la transformation et de l’acculturation du colonisé.

Depuis l’indépendance,  la  scolarisation  de  l’enfant africain francophone n’a pas changé, pire elle pose  problème  et  pour  cause  la  sainte  maxime  de l’assimilation. Ainsi, le scolarisé suit une évolution logique consistant pour le jeune africain à quitter son environnement pour le cercle des lettrés , ce qui équivaut à s’entrainer au roôle de ces évolués  littéralement « Blancs à la peau noire » qui vivent comme les colons.

La  remise  en  question  du  système  scolaire  centrafricain  que je connais mieux se couple avec le constat africain de l’inapdatation de l’école. La  plupart des  pays  anciennement colonies françaises  ne sont pas motivés  par  la  recherche  du  sens  des  connaissances  que  l’école dispense. Si savoir « Ecrire » permet de mettre sur papier une idée  ou  une  critique  afin  de  les  partager  avec  les concitoyens,  savoir  « Lire »   permet   par   contre   de   profiter  de l’expérience des autres qui ont pu apprendre quelque chose dans leur vie et qui ont pris la peine et le temps de traduire cette expérience en la mettant sur papier.

C’est à travers la lecture et l’écriture que l’école prend tout son sens. Son but n’est pas de nous apprendre à copier ou d’apprendre par cœur des façons de parler ou  de  s’exprimer.

Pour mieux comprendre la remise en cause du sens de l’école en Afrique, il y a lieu d’observer par curiosité un phénomène qui semble banal sur le continent.

De l’Algérie au Gabon en passant par le Nigéria et le  Cameroun pour ne citer que ces pays qui ont le pétrole et d’autres richesses minières ou forestière, on trouve plein d’écoles. Alors comment explique-t-on à la nouvelle génération que ces pays qui produisent depuis des années du pétrole n’ont construit aucune école qui enseigne n’importe quelle discipline en rapport avec l’extraction ou le raffinage de cette ressource.

Dans la majorité  de ces pays africains, beaucoup mange le manioc ou le maïs. Pourtant nulle part, on ne trouve des structures dédiées  à l’enseignement des variétés de manioc, comment apprendre la meilleur façon de planter, de croiser, de traiter les plantes ou tout simplement apprendre la composition des tubercules du manioc et la façon de transformer celles-ci en farine.

Dans la contrée d’origine d’un de mes collègues de lycée, le poisson est abondant dans les cours d’eau. Tout homme ici  est pêcheur. Pourtant il m’a rapporté que son père l’avait envoyé à l’école avec un seul espoir; le voir devenir fonctionnaire pour échapper à la vie de pêcheur. Les cultivateurs et les éleveurs font de même pour éviter à leurs enfants de rester dans un environnement à leurs yeux primitifs et ils ont peut-être raison. Mais en réalité, c’est l’exécutant Noir remplaçant ou successeur du colon qui est le premier responsable de l’orientation de leurs décisions . Ceux des Noirs qui avaient pris le pouvoir au départ du colon n’avaient pas compris comment donner un sens à la notion d’écoles de pêche, d’agriculture ou d’élevage.

Les privilégiés qui gouvernent continuent avec un système éducatif calqué sur le modèle colonial, sans une volonté ou sans un projet de révision du contenu de l’enseignement de l’école primaire au secondaire et  sans orientation des matières enseignées dans les universités. Il suffit de lister les thèses de doctorat des universités francophones d’Afrique noire pour se rendre à l’évidence que les responsables de ces institutions n’ont pas encore saisi le sens profond de l’école. Ils disent à qui veut les croire ‘‘qu’ON  les empêche de …’’

Pourtant, l’école doit  permettre d’apprendre le sens et l’intérêt de l’amélioration du quotidien. Elle doit permettre de développer, voir d’approfondir la transmission des connaissances, ceci dans une langue que l’on maîtrise. Elle est, pour ainsi dire, le lieu par excellence de l’apprentissage de la nécessité d’amélioration du quotidien.

La première ambition politique à nourrir par une Afrique qui veut changer devra être celle autour des concepts de l’école, de l’éducation, de la formation et leurs corolaires la culture et l’identité intellectuelle. Tout cela est orienté vers l’amélioration de l’environnement immédiat pour le bien être basique. De façon primaire, instinctif et primitif, Il s’agit de travailler pour satisfaire les besoins physiologiques , base de la pyramide  de Maslow  à savoir :boire, manger et dormir.

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Par la transmission de la connaissance et du savoir-faire d’une société et son adéquation, l’homme se met dans la capacité de vaincre des calamités naturelles et de part cela comprendre la nature pour vivre en harmonie avec elle. La force de l’école réside en premier lieu dans l’outil culturel qu’est la langue dans laquelle se déroule l’enseignement.

Ainsi, dans la volonté de repenser l’école, il paraît essentiel de coupler enseignement, recherche et documentation.

Des observations dans la nature peuvent nous servir de fil conducteur. Pour cela, regardons le monde des insectes, particulièrement les termites. Plusieurs documentations et publications ont été faite sur la nature et l’existence des termites. Mais aucune de ces travaux ou publications n’émane d’université ou centre de recherche africain ou  sur financement d’un gouvernement structement africain. Les africains consomment le luxes : ils  achètent des voitures de luxes, des villas, voir des châteaux à l’étranger. Pourtant aucun de ces gouvernants ne finance la recherche sur des choses aussi banales que celle de savoir comment les termites construisent leurs termitières, quelle température y règne ou encore comment est fait le matériel qui rend les termitières imperméables.

C’est justement à l’école qu’il est possible d’apprendre à chercher et a documenter.

A l’heure ou le monde entier est en compétition pour un partenariat avec les pays africains, il serait judicieux que l’école de ces pays deviennent les lieux ou on apprend comment creuser intelligemment le sous sol à la recherche de minerais, comment identifier ces richesses minières cachées dans son sous sol. C’est dans un tel établissement que l’enfant doit apprendre à identifier les types de bois, les nommer, les décrire et surtout documenter comment ces bois poussent afin de mieux les connaître pour les protéger. Cela devrait aussi être l’endroit ou l’enfant comprend la composition du diamant, de l’Or, du Cobalt ou du Coltran et être en mesure d’expliquer  pourquoi l’un est écarlate, l’autre conducteur. C’est dans un tel type d’écoles que les enfants devraient  apprendre à terrasser les monticules pour tracer les routes, et à utiliser les terres et les pierres sortis de ce terrassement pour construire les ponts.

Oui, aller à l’école ne devrait plus être opposé au choix de rester cultivateur ou pêcheur. Aller a l’école doit servir à amener l’enfant du pêcheur à approfondir et améliorer les techniques de la pêche et créer une structure de conservation au frais ou à sec du poisson.

Il faut oser changer la compréhension que les gouvernements africains se font de la notion de l’école et apporter un contenu orienté et adapté à l’amélioration des conditions de vie de l’Homme chez eux.

Dans ce projet politique d’un  système  en  mutation, il importe certainement  de  rechercher  la valorisation de la  vraie  identité d’une école qui enseigne et contribue en proposant un travail conceptuel d’amélioration de son environnement en opposition à la frénésie  dans la perfection de l’assimilation.

L’Afrique gagnera à redéfinir ses limites  en matière d’éducation,   d’instruction   et   de formation car aujourd’hui, ces notions sont diffuses, parfois floues. L’école est en Afrique, très éloignée des besoins sociaux et économiques. Elle est non relative, non orientée voir non focalisée sur les besoins de l’Africain. En Afrique francophone, l’école est tout sauf utile pour la vie de la majorité. Cela doit changer, osons pour que cela change : Osons le changement en Afrique.

Jean-Pierre MARA

Ingénieur en Télécommunication,

Ancien Député

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